Dans les décennies suivantes, les coups d'Etat militaires répétés et la guerre civile entre le Nord et le Sud du Soudan ont conduit le pays à un isolement prolongé et à sa partition en deux nations indépendantes.
Nombreux sont ceux au Soudan qui reprochent au régime anglo-égyptien d'avoir attisé les différences ethniques et religieuses ayant finalement conduit au divorce sanglant et à la création du Soudan du Sud en 2011.
Mais il y avait une véritable affection pour la reine Elizabeth II, dont le décès la semaine dernière à l'âge de 96 ans a ravivé au Soudan des souvenirs de sa seule et unique visite il y a un peu plus d'un demi-siècle.
"J'étais une jeune écolière en uniforme, on nous a sorti de la classe et emmené saluer la reine", se souvient Belqis Rikabi, une septuagénaire soudanaise à Khartoum.
Mme Rikabi se rappelle avoir été si impressionnée par la robe d'Elizabeth II qu'elle s'était frayée un chemin parmi la foule compacte dans l'espoir de toucher les atours royaux.
"L'un des garde m'a alors violemment frappée, mais la reine est intervenue et a crié 'non, non, non'", se souvient Mme Rikabi: "Le garde s'est ensuite arrêté et la reine a soulevé un pan de sa robe pour que je la touche".
Lors de sa visite dans la capitale soudanaise en février 1965, la reine a séjourné dans le Grand Hôtel de l'époque coloniale qui surplombe le Nil, où un portrait d'elle trône toujours aux côtés de photos d'autres Britanniques éminents parmi lesquels l'ancien Premier ministre Winston Churchill.
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"Cet hôtel regorge de souvenirs, de photos et de traces de tous les grands de ce monde qui y ont séjourné, notamment la reine Elizabeth II", déclare à l'AFP Abdelmoneim Abdelmahmoud al-Hassan, directeur de l'établissement.
Construit en 1902, le "Grand Hotel" a notamment accueilli l'ancien président sud-africain Nelson Mandela et le militant américain des droits civils Malcom X.
Selon M. Hassan, la visite d'Elizabeth II "trouve toujours un écho auprès des Soudanais", plus d'un demi-siècle plus tard.
Manahel Abou Kachwa, 73 ans, se souvient quant à elle avoir rencontré la reine a deux reprises: une première fois en 1965 et une autre en 2000.
Mme Abou Kachwa avait 16 ans quand elle a rencontré la reine lors de son passage dans sa ville natale de Wad Madani, à 200 kilomètres au sud de Khartoum.
"Nous étions 10 lycéennes à avoir été choisies pour recevoir la reine durant sa visite dans notre école", se souvient-elle: "J'étais émerveillée par elle et par la manière avec laquelle tout le monde se pressait à son service."
En 2000, elle la rencontre à nouveau, mais cette fois en sa qualité d'épouse de l'ambassadeur du Soudan au Royaume-Uni, Hassan Abdeen.
Lors de la cérémonie de remise des lettres de créances, "je lui ai dit que nous nous étions déjà rencontrées (en 1965) et elle a ri", raconte Mme Abou Kachwha, soulignant avoir discuté avec la souveraine des robes traditionnelles soudanaises.
Et d'ajouter: "J'ai appris sa mort avec tristesse, c'était une femme exceptionnelle."