Un animateur TV galvanise l'opposition à la réforme républicaine du système de santé aux Etats-Unis

L'animateur américain Jimmy Kimmel parle aux oscars à Los Angeles, le 26 février 2017.

Oubliez les démocrates, les républicains du Congrès se sont trouvé un nouvel adversaire redoutable dans leur tentative de détricoter Obamacare: l'un des animateurs les plus connus des Etats-Unis, Jimmy Kimmel, bouleversé par l'opération de son fils à la naissance pour un problème au coeur.

Trois heures après la naissance de son second enfant, Billy, en avril, les médecins l'ont informé que le nouveau-né devait être opéré en urgence pour une malformation cardiaque. Une intervention réussie, extrêmement coûteuse et couverte par son assurance.

Au bord des larmes, Jimmy Kimmel a raconté dans son émission quotidienne nocturne le calvaire de ces terribles heures d'attente, à l'hôpital pour enfants de Los Angeles.

Depuis, l'humoriste s'est transformé en véritable militant d'Obamacare. Richissime, il aurait pu payer quelle que soit son assurance.

Mais l'incident lui a ouvert les yeux sur l'importance des protections de la loi de Barack Obama pour les plus modestes. Il a tracé une ligne rouge pour toute réforme potentielle de la couverture-maladie: est-ce que le futur système permettra à des parents moins riches que lui de soigner leur enfant pour un problème similaire? Le "test Jimmy Kimmel" était né.

C'est à cette aune qu'est évalué le nouveau plan républicain pour abroger partiellement la loi sur la santé de Barack Obama, en discussion en ce moment au Congrès. Et selon Jimmy Kimmel, les républicains ont raté le test.

Les opposants ne manquent pas à ce projet de réforme républicain: les démocrates, des médecins, des associations de malades et de retraités, des compagnies d'assurance, des gouverneurs et même quelques élus républicains.

Mais aucun de ces adversaires n'a la popularité ni la force d'une star regardée chaque soir par deux millions de téléspectateurs, et dont les monologues sont ensuite partagés sur Facebook et repris sur les chaînes d'informations comme un élément à part entière du débat.

Déferlement médiatique

Cette semaine, Jimmy Kimmel a publiquement accusé un sénateur républicain coauteur du projet de réforme d'avoir trahi sa parole, déclenchant un torrent de réactions.

Le sénateur de Louisiane Bill Cassidy était venu dans son émission en mai promettre qu'il ne soutiendrait jamais de loi qui plafonnerait les montants des remboursements par patient, un acquis d'Obamacare qui se révèle crucial en cas d'opérations sur des nouveaux-nés, qui peuvent coûter plusieurs centaines de milliers de dollars.

Mais la loi en discussion ouvrirait la voie à une remise en cause de cette protection. "Il m'a menti les yeux dans les yeux", a tonné Jimmy Kimmel mardi.

Depuis, c'est presque comme si le présentateur était devenu chef de l'opposition. Des élus du Congrès au vice-président, l'inévitable question leur est désormais posée en interview: et le test Kimmel?

"Je suis désolé qu'il ne comprenne pas", a répondu le sénateur Cassidy, interviewé sur CNN, défendant avec peine son texte.

"Ah d'accord, je ne comprends pas parce que je ne suis qu'un animateur de télévision ?" a rétorqué Kimmel mercredi, consacrant une nouvelle partie de son émission au sujet."C'est la pire proposition de réforme du système de santé qui existe", a-t-il dit.

Le vice-président Mike Pence s'est vu poser la question du test Kimmel, tout comme la porte-parole de la Maison Blanche, et d'autres sénateurs. L'un d'eux, Lindsey Graham, a accusé l'animateur d'avoir "avalé" les éléments de langage des démocrates.

Fox News, la chaîne d'information préférée des conservateurs et de Donald Trump, s'en est aussi mêlée. L'un des animateurs de l'émission matinale Fox & Friends, Brian Kilmeade, a insinué que Jimmy Kimmel avait des arrière-pensées politiques.

"Mon fils a eu une opération à coeur ouvert et doit en subir deux autres. C'est comme cela que je me suis rendu compte qu'il y avait des enfants sans assurance dans la même situation" a lancé à l'antenne l'humoriste. "Toute cette histoire ne me rapporte rien, Brian, espèce de pauvre type".

Le vote sur la loi républicaine est prévu pour la semaine prochaine au Sénat.

Avec AFP