"Il semble que nous soyons très près de la dernière ligne droite", a commenté le président du Conseil européen Donald Tusk.
C'est lui qui a annoncé le feu vert des 27, quelques heures seulement après l'annonce de l'accord trouvé dans les derniers instants avant l'ouverture du sommet européen.
Les chefs d'Etat et de gouvernement attendent maintenant que le Parlement européen ratifie le document et "s'assure d'une entrée en vigueur le 1er novembre".
Lire aussi : L'accord de Brexit approuvé par les 27, annonce Donald TuskMalgré la satisfaction d'avoir arraché un accord dans la dernière ligne droite, personne ne s'est laissé aller à l'euphorie, bien conscient d'un obstacle de taille sur le chemin d'un Brexit ordonné: le vote du Parlement britannique.
Aux côtés du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, Boris Johnson a exhorté les députés britanniques à soutenir l'accord pour "faire aboutir le Brexit sans délai", à la date prévue du 31 octobre.
"Je suis confiant que lorsque les députés de tous les partis regarderont cet accord, ils verront l'intérêt de le soutenir", a-t-il assuré, se disant "très confiant".
Mais l'annonce aussitôt faite, les modifications à l'accord de retrait à peine publiées, le parti unioniste nord-irlandais DUP, allié-clé du Parti conservateur de Boris Johnson, a jeté un froid en affirmant son opposition à l'accord trouvé.
Lire aussi : Brexit : Barnier et Juncker obtiennent un accord pour la gloireLe DUP, qui compte 10 députés à la Chambre des Communes, a dit ne pas être "en mesure de soutenir ces propositions au Parlement", sur les questions de règlement douanier et du consentement de l'exécutif nord-irlandais au projet de Brexit.
- Corbyn appelle au rejet -
Puis le chef du Parti travailliste, principale formation d'opposition au Royaume-Uni, a appelé les députés britanniques à "rejeter" l'accord entre Londres et l'Union européenne. Selon Jeremy Corbyn, "la meilleure façon de résoudre le Brexit est de donner à la population le dernier mot lors d'un vote populaire".
Les députés britanniques se réuniront samedi - leur réunion un samedi est une première depuis la guerre des Malouines en 1982 - pour une séance exceptionnelle. Ces deux prises de position rendent toutefois improbable l'adoption du texte.
"Si c'est le cas, nous nous trouverons dans une situation extrêmement compliquée", a averti Jean-Claude Juncker lors d'un point de presse à l'issue de la première journée du sommet.
Lire aussi : Le sort du Brexit se joue cette semaine"Il faudra bien qu'un jour dans cette assemblée (...) on prenne ses responsabilités et que ce qui a été décidé par un référendum, et soutenu par les différents gouvernements avec lesquels nous avons négocié, se mette en oeuvre", a observé le négociateur de l'UE Michel Barnier.
"Nous sommes prêts pour la ratification: logistiquement, politiquement, techniquement. Maintenant, la balle est dans le camp du Royaume-Uni", a déclaré Donald Tusk.
"Je ne sais pas quel sera le résultat du débat à la Chambre des Communes samedi", a-t-il reconnu, "mais si une demande pour un report (de la date du Brexit) est déposée, je consulterai les Etats membres pour voir comment réagir".
Pour Jean-Claude Juncker, l'accord trouvé "signifie qu'il n'y a pas besoin d'une quelconque prolongation".
Le président français Emmanuel Macron a déclaré vouloir "croire que Boris Johnson aura une majorité". Il a reconnu que "la satisfaction s'accompagne d'une légitime prudence".
Les Européens sont quelque peu échaudés par la précédente expérience de l'accord négocié avec Theresa May, rejeté à trois reprises par le Parlement britannique, ce qui avait entraîné le départ de la prédécesseure de Boris Johnson.
Au fil des annonces, la livre a connu une nouvelle journée agitée, gagnant 1% face au dollar au moment de l'annonce qu'un accord avait été trouvé, avant de réduire ses gains.
Le compromis trouvé jeudi modifie l'accord précédemment rejeté et fait disparaître le "backstop" (filet de sécurité) controversé. Cette clause de sauvegarde maintenait l'UE et le Royaume-Uni dans un territoire douanier unique, à défaut d'autre solution pour éviter le retour d'une frontière dans l'île d'Irlande, afin de préserver la paix après des décennies de violences.
- Unité -
Jusqu'ici l'UE était réticente à changer cette partie du texte. Le nouveau compromis établit des règles particulières pour les douanes concernant les marchandises arrivant en Irlande du Nord, qui reste dans le territoire douanier britannique, selon que celles-ci sont destinées à y rester ou à passer dans le marché unique européen.
Il prévoit également un mécanisme de "consentement" des autorités nord-irlandaises sur la poursuite de l'application de certaines règles de l'UE dans la province britannique, après une période de quatre ans suivant la mise en oeuvre de l'accord.
Le Premier ministre irlandais Leo Varadkar s'est félicité d'un accord "bon pour l'Irlande et l'Irlande du Nord" qui "respecte une histoire et une géographie uniques".
Il a aussi rendu hommage à l'unité et la solidarité affichées par ses homologues pendant la négociation.
"L'unité que nous avons vue au cours des dernières années est une leçon pour nous pour le futur. Quelque chose que nous conserverons pour les futures négociations", a-t-il salué.
L'accord de retrait, s'il est adopté, prévoit plus généralement les conditions du divorce entre le Royaume-Uni et l'UE, notamment en matière de droit des citoyens et de respect des engagements financiers. Il introduit également une période de transition jusqu'à décembre 2020 pour un départ en douceur.
Si le texte est ratifié, une nouvelle négociation s'engagera: celle du futur partenariat entre l'UE et le Royaume-Uni, en particulier sur le plan commercial.
Avec AFP