Brexit: May fragilisée dans ses discussions avec l'UE par une défaite au Parlement

La Première ministre britannique Theresa May, à Londres le 12 février 2019.

La Première ministre britannique Theresa May a essuyé jeudi une défaite embarrassante au Parlement, qui fragilise sa position dans les discussions qu'elle mène avec Bruxelles pour tenter d'obtenir une modification de l'accord de Brexit.

A six semaines de la date prévue pour la sortie de l'UE, le 29 mars, les députés ont rejeté, par 303 voix contre 258, la motion dans laquelle le gouvernement expliquait comment il souhaitait renégocier l'accord de divorce conclu avec l'Union européenne, qui avait été sèchement recalé lors d'un vote mi-janvier au Parlement britannique.

L'exécutif affirmait dans cette motion poursuivre un double objectif: obtenir des "arrangements alternatifs" au "filet de sécurité" censé maintenir une frontière ouverte sur l'île d'Irlande après le Brexit ("backstop" en anglais), et écarter le scénario d'un "no deal", soit une sortie sans accord redoutée par les milieux d'affaires comme par une partie des députés.

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Mais les plus fervents partisans du Brexit au sein du Parti conservateur au pouvoir refusent de voir le gouvernement cautionner l'abandon du scénario du "no deal". Ils avaient prévenu de leur intention de s'abstenir si la motion n'était pas reformulée, et ont donc fait basculer le vote.

Si le vote n'a pas de conséquence contraignante pour l'exécutif, il affaiblit la Première ministre dans sa tentative de rouvrir les négociations avec Bruxelles: la dirigeante britannique, qui se prévalait jusque-là d'un "mandat clair" des députés pour modifier l'accord, vient de perdre cet appui. Des "où est-elle ?" ont fusé à la Chambre des Communes, alors que la cheffe du gouvernement avait pris soin de ne pas assister à l'annonce des résultats.

"Le vote de ce soir montre qu'il n'y a pas de majorité pour la ligne de conduite de la Première ministre", a tonné le leader du parti travailliste, Jeremy Corbyn.

Ce dernier, qui a une nouvelle fois accusé l'exécutif de "jouer la montre", a néanmoins lui aussi essuyé une défaite. Son amendement, visant à limiter la marge de manoeuvre du gouvernement, a été rejeté par 322 voix contre 306.

Un autre amendement, soutenu par le parti indépendantiste écossais SNP, exigeant de repousser la date du Brexit, a lui aussi été rejeté, tandis que la députée conservatrice Anna Soubry a retiré avant le vote son amendement, qui réclamait au gouvernement la publication d'une étude sur l'impact économique d'un Brexit sans accord. Elle a annoncé avoir obtenu de l'exécutif la garantie que les documents seraient rendus publics.

Downing Street a réagi en assurant que le gouvernement "continuerait" à travailler pour obtenir un accord remanié, afin "que nous sortions (de l'UE) comme prévu le 29 mars".

- "L'UE attend toujours" -

Mais, Theresa May, engagée depuis deux semaines dans de nouvelles discussions avec l'UE, peine à obtenir une réouverture des négociations. Alors que les dirigeants européens se montrent inflexibles, elle a reconnu mardi avoir "besoin de temps".

"L'UE à 27 attend toujours de Londres des propositions concrètes et réalistes pour sortir de l'impasse", a déclaré mercredi le président du Conseil européen, Donald Tusk.

La principale pierre d'achoppement demeure la question du filet de sécurité irlandais. Ce dispositif prévoit, en dernier recours, de maintenir le Royaume-Uni dans une union douanière avec l'UE, ainsi qu'un alignement règlementaire sur l'UE plus poussé pour l'Irlande du Nord.

Il est rejeté par les partisans du Brexit, aux yeux desquels il empêcherait le pays de rompre les liens avec l'UE et de pouvoir mener une politique commerciale indépendante. Mais les dirigeants européens refusent de le modifier.

Le gouvernement multiplie les initiatives pour tenter de convaincre les 27. La dirigeante britannique s'est encore entretenue avec les présidents français Emmanuel Macron et roumain Klaus Iohannis mercredi.

Reste que la défaite de jeudi risque de rendre ces discussions "encore plus difficiles", a souligné Ronan McCrea, de l'University College de Londres: les dirigeants européens "diront à juste titre: +comment pouvons-nous savoir que les concessions que nous faisons ne seront pas suivies d'autres étant donné que nous ne savons pas si vous pouvez obtenir quoi que ce soit au Parlement ?+".

Theresa May se laisse jusqu'au 26 février pour trouver une issue. Sans nouvel accord à cette date, un nouveau débat sera organisé le lendemain au Parlement.

Avec AFP