Maintien en prison des leaders de la contestation anglophone au Cameroun

Les avocats et l’assistance dans la cour du tribunal militaire lors de l'audience criminelle spéciale de deux leaders de la contestation anglophone, à Yaoundé, Cameroun, 7 juin 2017.

Le tribunal militaire de Yaoundé a décidé du maintien en prison des leaders de la contestation anglophone poursuivis pour "terrorisme" au Cameroun, fixant la reprise du procès au 29 juin.

La présidente du tribunal militaire de l'audience criminelle spéciale s'est abondamment appuyée sur la loi qui lutte contre le terrorisme au Cameroun, pour maintenir en prison les deux leaders de la contestation anglophone.

Me Agbor Bala et l'enseignant Fontem Neba sont poursuivis pour coaction d’actes de terrorisme, hostilité contre la patrie, sécession, révolution, insurrection, outrage à corps constitués etc.

"Les personnes poursuivies pour les actes de terrorisme ne peuvent pas bénéficier de la liberté sous caution parce que la loi ne le prévoit pas", a déclaré la présidente du tribunal militaire de Yaoundé, citant une panoplie d'articles.

Lors de la dernière audience, le ministère public s’est dit favorable à la demande de liberté provisoire formulée par les avocats des leaders anglophones.

Il avait tout de même indiqué que la condition était que Me Felix Nkongho et Dr Fontem Neba soient placés sous résidence surveillée.

Une décision qui a laissé les avocats des accusés sans voix.

Sous la conduite de Me Bernard Muna qui dirige le collège des avocats de la défense, ceux -ci ont tenu quelques conciliabules loin des journalistes avant de quitter la cour principale du tribunal militaire de Yaoundé, sans mot dire.

Me-eh walice Kum, avocat de deux leaders de la contestation anglophone lors de l'audience criminelle spéciale à Yaoundé, ameroun, 7 juin 2017. (VOA/Emmanuel Jules Ntap)

Seul l'avocat Me-eh walice Kum a exprimé le sentiment mitigé de ses confrères suite à la décision du tribunal militaire de maintenir l'avocat international Agbor Bala et l'enseignant d'université Fontem Neba en détention durant le procès qui les oppose au ministère public.

"Le droit international est supérieur au droit national. Les avocats que nous sommes, avions plaidé pour leur libération selon le droit international. Mais pour le tribunal criminel, ils ne peuvent l'être dans cette circonstance, parce qu'ils sont poursuivis pour des crimes punis de peines de prison à vie ou de mort," a regretté Me Me-eh Walice Kum.

Le 29 juin 2017, le procès reprendra pour les débats de fond.

Pour les avocats, le rendez-vous sera de tout espoir.

"Cette décision conforte les avocats et les accusés dans leur bonne position parce-que l'affaire sera jugée et justice sera rendue. Nous prions que la justice soit en leur faveur. Si cela n'est pas le cas, nous serons frustrés", a soutenu Me Me-eh Walice Kum.

Parmi les personnes à la barre le mercredi 07 juin 2017 au tribunal militaire de Yaoundé, Il y'avait l'animateur de radio Mancho Bibixy.

Ce dernier a marqué les esprits en arrivant pour la première fois au tribunal pieds nu, en culotte et chemise entièrement déboutonnée.

Les éléments commis pour sa garde ont dû le menotter à sa descente du car des prisonniers.

Et, au moment de quitter l'enceinte du tribunal militaire de Yaoundé, Mancho Bibixy s'est écrié plus d'une fois "southern Cameroon will win " (Ndlr, le sud du Cameroun va l’emporter), faisant allusion à la création d'une république indépendante anglophone au Cameroun avec les régions du nord-ouest et du sud-ouest.

M. Mancho est considéré par la justice comme l'un des leaders du soulèvement de la minorité anglophone entre novembre 2016 et janvier 2017.

L'animateur de radio avait été interpellé pour non-détention de carte nationale d'identité. Il n'était pas concerné par la demande de mise en liberté sous caution.

Pour rappel, les principaux leaders de la contestation anglophone et 25 autres personnes sont poursuivis au tribunal militaire de Yaoundé.

Reportage d’Emmanuel Jules Ntap à Yaoundé pour VOA Afrique.