Vainqueur des élections en 2011, le Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste) avait largement remporté les législatives du 7 octobre.
Son secrétaire général Abdelilah Benkirane avait été chargé par le roi Mohammed VI de former un gouvernement de coalition mais après d'intenses et interminables tractations, il n'y est pas parvenu.
M. Benkirane propose de reconduire la coalition sortante qu'il dirigeait déjà, une alliance hétéroclite de quatre formations rassemblant islamistes, libéraux et ex-communistes. Mais il fait face à l'opposition de l'ex-ministre de l'Agriculture et patron du Rassemblement national des indépendants (RNI, libéraux), Aziz Akhannouch.
L'une des plus grosses fortunes du continent, de tous les voyages officiels du roi Mohammed VI, M. Akhannouch multiplie les conditions pour sa participation au gouvernement, dont la principale est l'intégration à la coalition de deux autres formations: l'Union socialiste des forces populaires (USFP) et l'Union constitutionnelle (UC).
Il est parvenu à constituer autour de lui une alliance lui permettant de tenir tête à Benkirane, et se poser comme un nouveau poids lourd de la politique locale et de l'opposition aux islamistes.
Il n'y a "rien de nouveau dans le processus de formation du gouvernement", a indiqué la semaine dernière M. Benkirane. Il a réitéré sa proposition de reconduire la majorité sortante.
S'exprimant samedi devant les militants de son parti, M. Akhannouch a de son côté réaffirmé qu'il "n'ira pas au gouvernement sans l'USFP".
- 'Affligeant'-
Le bras de fer entre Benkirane et Akhannouch se poursuit donc, la presse marocaine se demandant qui est le responsable de ce blocage.
Certains éditorialistes s'inquiètent des conséquences du "spectacle politique affligeant de ces derniers mois", alors que les électeurs marocains ont "toutes les raisons de se sentir floués", souligne l'hebdomadaire TelQuel.
C'est la première fois dans son histoire récente que le royaume reste aussi longtemps sans gouvernement. Mais il n'en continue pas moins de tourner, s'accorde à dire cette même presse, rappelant que l'impact de cette absence de gouvernement sur la vie des institutions et le quotidien des Marocains reste très limité.
Traditionnellement au Maroc, les lignes idéologiques des partis comptent peu ou pas dans la formation des coalitions, qui travaillent sous la tutelle du roi, chef d'Etat au-dessus des partis, lequel garde la haute main sur la diplomatie, la sécurité ou les secteurs clés de l'économie.
En l'absence de coalition gouvernementale, ces derniers mois ont été surtout marqués par le retour du Maroc au sein de l'Union africaine, acté fin janvier à Addis-Abeba, et l'offensive diplomatique tous azimuts menée par le roi sur le continent.
La Constitution marocaine ne dit rien au cas où le chef de gouvernement désigné n'arrive pas à former sa majorité. La tenue d'élections anticipées est, elle, jugée peu probable par la presse.
"J'attends désormais le retour de Sa Majesté" a déclaré fin février le Premier ministre, alors que le souverain enchaîne les tournées africaines, et séjourne actuellement en Côte d'Ivoire. "Si j'ai d'ici-là constitué un gouvernement, je le lui présenterai, sinon je lui en ferai part", a averti, laconique, M. Benkirane.
"Tous les regards sont désormais tournés vers le roi", estimait lundi le site d'information en ligne Médias 24. Arbitre au-dessus des partis, le roi "sera de retour dans les prochaines heures ou les prochains jours". (...) On espère un déblocage dans la foulée", pronostiquait ce site, même si "la réponse du roi est la grande inconnue".
Avec AFP