Inquiétudes au Kenya suite à la légalisation d'une boisson alcoolisée locale controversée

La légalisation du Chang'aa n'est pas une panacée, estiment les critiques, qui redoutent que cette boisson ne fasse encore plus de ravages parmi les Kenyans

Cette boisson d’un coût modique, le Chang’aa, a suscité une véritable crise dans le secteur de la santé, tuant régulièrement ses consommateurs quand il ne les rend pas aveugles. En août, 17 personnes ont perdu la vie au cours d’un seul weekend, ayant consommé une ration particulièrement nocive dans les taudis de Kibera à Nairobi.

Au Kenya, une loi interdisant une boisson alcoolisée locale, communément appelé « Chang'aa », a été abrogée. Les autorités espèrent que cela facilitera sa règlementation, vu son impact néfaste sur les populations.

L'alcool illégalement distillé est largement fabriqué au Kenya, et il s’agit le plus fréquemment d’une sorte de gin frelaté connu donc sous le nom de Chang'aa, fabriqué à base de maïs ou sorgho, et produit avec les distillateurs bruts construits à partir de vieux tambours d'huile. Le problème : il est souvent sujet à des adultérations sans scrupules par les vendeurs qui veulent lui donner davantage de force en ajoutant, par exemple, de l'acide de batterie ou du méthanol. Ou bien, sa distillation impure le rend dangereux pour la santé humaine.

D’un coût modique, le Chang’aa a suscité une véritable crise dans le secteur de la santé, tuant régulièrement ses consommateurs quand il ne les rend pas aveugles. En août, 17 personnes ont perdu la vie au cours d’un seul weekend, ayant consommé une ration particulièrement nocive dans les taudis de Kibera à Nairobi.

D’où les appels en faveur de la légalisation et régularisation de la boisson. C’est chose faite, le président Mwai Kibaki a paraphé le document cette semaine, et les partisans de la mesure espèrent que l’on pourra maintenant mieux en garantir la composition.

Un porte-parole de la Kenya Wine Agencies Limited, société qui fabrique des spiritueux locaux, s’est félicité de l’initiative du gouvernement. « Nous nous félicitons de l’esprit de cette loi parce qu’elle cherche à contrôler les alcools illicites qui, vous le savez très bien, sont une menace pour le pays. En même temps le texte introduit quelques mécanismes de contrôle pour la production, pour l'emballage, et même la consommation » a expliqué Gordon Mutugi.

Reste à voir si la nouvelle règlementation sera respectée. Certains parlementaires kenyans restent sceptiques.

« Le Chang'aa n'a aucune formulation standard qui à mon avis peut être commercialisée. Il varie d'un bout à l'autre. Je sais qu'ils essaient de résoudre ce problème en développant sa commercialisation, mais je crois que ce n’est pas le bon message. Les trafiquants utiliseront toujours les méthodes actuelles, y intégrant des produits chimiques mortels et le vendront ensuite sous prétexte que leur Chang'aa est produit conformément à certaines règles » s’est indigné le député Isaac Ruto du district de Chepalungu.