Au centre des attentions depuis que le coronavirus a atteint la grande cité religieuse de Touba - lieu saint de la confrérie des mourides - les chefs religieux ont tour à tour décidé de reporter ou d'annuler les célébrations qui étaient prévues.
Your browser doesn’t support HTML5
La décision a été prise pour se conformer aux directives étatiques mais pour Abel Sagna, le fond du problème demeure le mode de vie des sénégalais.
"Notre culture favorise la vitesse de propagation de la maladie. Nous nous saluons par la main, nous mangeons ensemble, nous buvons ensemble le thé, on est quasiment tout le temps ensemble", affirme ce jeune père de famille. Pour lui, le modèle très social de la société sénégalaise est "très favorable à la propagation de la maladie".
Yaya Junior Djiba estime que l'État doit aller au-delà de la sensibilisation par les médias. Pour ce jeune originaire du sud, les autorités doivent prendre des mesures pratiques pour que la population intègre certaines précautions. Yaya suggère également que le contrôle ne se limite pas aux frontières mais qu'il touche également les voyages à l'intérieur du pays.
"En Casamance, j'ai vu qu'il n'y avait pas de contrôle à l’aller comme au retour", témoigne-t-il. Il ajoute que ce sont "les Gambiens qui se sont un peu organisés et nous ont demandé de laver nos mains avant de traverser leur territoire" mais du côté du Sénégal, "il n'y a rien, alors que le coronavirus est là".
Lire aussi : Virus: les banques centrales se mobilisent, plus de 2.000 morts en Europe
Les avis de ces citoyens sont parfaitement en accord avec l'analyse du Dr Baba Mamadou Ndiaye, qui affirme que l'État doit anticiper et accentuer les efforts de sensibilisation envers la population afin de limiter les risques.
Pour lui, ces décisions auraient dû être prises depuis "longtemps" pour ensuite "vulgariser l’information" afin que la population adopte les mesures préventives recommandées. "Pas seulement se laver les mains, mais aussi les portables, les télécommandes et tout", souligne le médecin.
Pour prendre les devants face à l'intox et à la désinformation, l'État sénégalais a d'ailleurs décidé de partir en croisade contre les rumeurs infondées. Le Ministre de la santé, Abdoulaye Diouf Sarr, a annoncé des poursuites judiciaires contre ceux qui sapent l'effort national de lutte contre le coronavirus.
"Depuis quelques jours des vidéos circulant dans les réseaux sociaux remettent en cause la présence de cas de Covid19 au Sénégal", a d'emblée déclaré le Ministre qui "regrette" également que durant cette période, où la nation a besoin de la "conjonction des forces de ses fils et de ses filles", certains individus ont "l’outrecuidance" de diffuser des informations mensongères.
Lire aussi : La plus grande cité religieuse du Sénégal est devenue un foyer du coronavirus
Pour stopper ces pratiques, Abdoulaye Diouf Sarr annonce que le Comité national de gestion des épidémies va saisir le procureur de la république pour "la prise en charge judiciaire de tels faits considérés comme une entrave à la riposte nationale contre le Covid19".
Outre l'interdiction de rassemblements, le président Sall a entre autres annoncé la fermeture des crèches, écoles et universités pour trois semaines. A cela s'ajoute l'interdiction des bateaux de croisière, le renforcement des contrôles aux frontières et des moyens sanitaires et l'acquisition de matériels médicaux spécifiques, le déploiement d'hôpitaux mobiles par l'armée... Pour marquer la gravité du moment, même la célébration de la fête l'indépendance, prévue le 4 avril, a été annulée.
Le président Sall a aussi exprimé sa solidarité aux Sénégalais de la diaspora tout en leur demandant de respecter les mesures sanitaires en vigueur.