Lourdes peines pour esclavagisme en Mauritanie

La police à Nouakchott, Mauritanie. 6 août 2008.

Trois personnes ont été condamnées cette semaine en Mauritanie à des peines de 10 et 20 ans de prison ferme pour pratiques esclavagistes.

Les ONG de défense des droits de l'Homme accusent la Mauritanie de "déni" et de "censure" face à la persistance de cette pratique, officiellement abolie en 1981.

La Mauritanie s'est cependant dotée en décembre 2015 de trois tribunaux spécialisés dans les affaires d'esclavage, à Nouakchott, Nouadhibou (nord-ouest) et Néma (sud-est). Ce dernier avait prononcé une première condamnation en mai 2016, à l'encontre de deux hommes, qui avaient écopé de cinq ans de prison ferme.

Dans deux affaires distinctes, le tribunal de Nouadhibou a condamné mercredi une femme à dix ans de prison pour esclavage de trois soeurs, et à vingt ans un père, décédé avant le jugement, et son fils, a indiqué à l'AFP une source judiciaire.

Dans cette seconde affaire, "le père Saleck Ould Oumar et son fils qui n'a pas assisté au jugement ont été condamnés par contumace pour avoir réduit en esclaves la famille Joumaa, de quatre membres, dont deux enfants", a précisé la même source.

"Le procès s'est bien déroulé, dans le respect des règles, et la loi a été dite" s'est réjoui l'avocat des victimes, El-Id Ould Mohameden, pour qui "l'espoir est né de pouvoir aboutir à une normalisation de la situation humanitaire dans le pays".

Au premier procès, la prévenue, Ar-Rabiaa Mint Hammadi, avait fait valoir qu'elle n'avait pas d'enfant et avait assuré avoir élevé l'une des plaignantes comme sa fille, "satisfaisant à tous ses besoins sans sentir la nécessité de lui fixer un salaire précis", selon les mêmes sources.

Ce à quoi le procureur de la République lui a répliqué: "Il n'y a pas un esclavage doux et un autre rugueux, c'est un crime".

Le président de l'association SOS esclavage, Boubacar Ould Messaoud, s'est félicité de ce jugement qui "doit servir d'exemple pour une évolution normale des choses et pour enfin permettre à tous les Mauritaniens de dépasser cette tare et apprendre à vivre ensemble en toute quiétude".

Plusieurs cas similaires "sont pendants depuis plusieurs années" devant les trois tribunaux spécialisés, a affirmé M. Ould Messaoud à l'AFP, précisant avoir reçu des autorités l'assurance que "ces dossiers vont être dépoussiérés".

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Malgré des progrès juridiques, notamment l'adoption en août 2015 d'une nouvelle loi faisant de l'esclavage un "crime contre l'humanité" réprimé par des peines allant jusqu'à 20 ans de prison, contre cinq à dix ans auparavant, la situation n'a pas avancé dans les faits, selon des ONG.

Jusqu'à 43.000 personnes en Mauritanie étaient encore réduites en esclavage en 2016, soit environ 1% de la population totale, selon un rapport d'Amnesty International publié le 22 mars, citant des estimations d'organisations spécialisées.

Avec AFP