En signe d'apaisement, le nouveau maître du pays a profité de son discours d'investiture pour annoncer une enquête sur la répression meurtrière, à ses yeux "inacceptable", de la manifestation post-électorale du 1er août, qui a fait 6 morts.
"Voici le nouveau Zimbabwe, l'aube d'une 2e république du Zimbabwe", a lancé M. Mnangagwa devant plusieurs milliers de ses partisans enthousiastes et une brochette de chefs d'Etat africains réunis dans un stade de la capitale Harare.
Emmerson Mnangagwa, 75 ans, a pris la tête du Zimbabwe en novembre dernier après la démission de Robert Mugabe, lâché par l'armée et son parti au pouvoir, la Zanu-PF, au terme d'un règne autoritaire de trente-sept ans.
Lire aussi : Le chef de l'opposition se considère comme le chef "légitime" au ZimbabweCandidat de la Zanu-PF, l'ancien vice-président a été proclamé vainqueur de l'élection présidentielle du 30 juillet, crédité de 50,8% des suffrages contre 44,3% à son rival du Mouvement pour un changement démocratique (MDC), Nelson Chamisa.
Arguant de nombreuses fraudes, le MDC a contesté ces résultats devant la Cour constitutionnelle.
Mais la plus haute instance judiciaire du pays a validé finalement le scrutin vendredi, estimant que l'opposition n'avait pas fait la preuve de ces irrégularités.
Dans son premier discours de président élu, celui qui a été surnommé le "Crocodile", pour son caractère dur et intransigeant, a lancé un appel à l'unité du pays.
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'Création d'emplois'
"Nous sommes tous zimbabwéens, ce qui nous unit est plus fort que ce qui pourra jamais nous séparer", a-t-il lancé, "maintenant que les élections sont derrière nous, nous devons maintenant nous concentrer sur les défis économiques de notre nation".
Sorti exsangue de l'ère Mugabe, le Zimbabwe connaît une crise économique et financière catastrophique, avec un taux de chômage estimé à plus de 90% de la population.
"Nous allons lancer des mesures pour attirer les investissements nationaux et étrangers (...), la créations d'emplois sera au coeur de nos efforts", a-t-il lancé devant la foule.
"Mnangagwa est l'homme qu'il nous faut pour mener le Zimbabwe à la prospérité", s'est réjoui un de ses partisans, Blessing Muvirimi, assis au milieu des banderoles "célébrons un nouveau Zimbabwe" ou "tolérance zéro pour la corruption" déployées dans le stade.
"Nous, nous voulons que le peuple s'unisse et travaille main dans la main", a renchéri un autre, Malvern Makoni.
L'opposition a déjà opposé aux appels à l'union du vainqueur une sèche fin de non-recevoir.
"Je me considère légitimement comme le dirigeant du Zimbabwe (...) nous avons remporté une nette majorité", avait déclaré samedi devant la presse Nelson Chamisa, qui a délibérément boudé la cérémonie d'investiture.
"La voie juridique n'est pas la seule vers la liberté, la Constitution nous donne le droit de manifester pacifiquement", a-t-il dit.
'Inacceptable'
La campagne pour les élections générales est apparue plus ouverte que lors des scrutins précédents, systématiquement entachés des violences du pouvoir contre ses adversaires.
Mais les fraudes alléguées par l'opposition et, surtout, la sanglante répression par l'armée de la manifestation du 1er août ont ravivé le spectre du passé. Plusieurs dizaines de partisans de l'opposition ont également été arrêtés ces derniers jours, a accusé le MDC.
M. Mnangagwa a regretté dimanche la répression du rassemblement du 1er août. "L'incident violent isolé et malheureux du 1er août était regrettable et totalement inacceptable", a-t-il dit, "j'annoncerai bientôt la nomination d'une commission d'enquête".
Les observateurs internationaux ont pour la plupart accordé leur onction au déroulement du scrutin.
L'Union européenne (UE) a exprimé des réserves, notamment sur le libre accès aux médias publics. Plus sévère, une mission américaine a conclu que le Zimbabwe ne disposait "pas encore de la culture démocratique et tolérante" requise.
De nombreux chefs d'Etat africains ont apporté par leur présence dimanche à l'investiture de M. Mnangagwa leur onction au scrutin.
Parmi eux figurent le Sud-Africain Cyril Ramaphosa, le Zambien Edgar Lungu, le Rwandais Paul Kagame et le président de la République démocratique du Congo Joseph Kabila.
L'ex-président Robert Mugabe s'est excusé et s'est fait représenter par sa fille Bona. Celui qui avait traité son successeur de "traître" après sa chute lui a toutefois envoyé ses "chaleureuses félicitations", selon un message lu par... M. Mnangagwa.
Avec AFP