Inquiétudes dans le rang des Béninois depuis la fermeture temporaire de la frontière du Nigeria.
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L'opérateur économique Razacki Olofindji pense que le Nigeria doit avoir ses raisons de fermer de façon unilatérale ses frontières alors qu'il a adhéré à la zone de libre-échange.
"Si on fermait définitivement les frontières, les conséquences seront grandes pour bien de pays", poursuit l'opérateur économique Razacki Olofindji
"Il doit avoir une raison. Ça ne peut pas se prendre comme ça. Il y a six mois, d'ailleurs presque chaque année, c'est la tomate du Burkina Faso qui traverse le Ghana, le Togo, le Bénin et qui va au Nigeria. Notre ananas aussi est très prisé au Nigeria. Donc si on fermait définitivement, imaginez un peu les conséquences pour ces pays cités", souligne l'homme d'affaires.
La fermeture de la frontière va donner un coup d'arrêt aux activités commerciales entre le Bénin et le Nigeria. Les consommateurs béninois vivent des prdouits nigérians. A la frontière de Sèmè Kraké, quelques commerçants expriment déjà leurs inquiétudes.
Amina Tahirou, une vendeuse, souligne que "les clients se font rares, même les débiteurs".
"Pour vendre, pour trouver cinq francs maintenant, c'est des problèmes. C'étaient les convoyeurs de véhicules qui achetaient chez nous après avoir fini leurs affaires au port. Maintenant, on ne les trouve même plus . Même ceux qui nous doivent et qui sont au Nigeria ne viennent plus", se lamente Mme Tahirou.
Lire aussi : Le Bénin interdit le commerce des produits pétroliers de contrebandeAlfred Bada est un vendeur de téléphones et d'appareils électroménagers près de la frontière. Contrairement aux autres jours, il est venu juste vérifier si la situation a évolué. Pour lui, inutile d'ouvrir sa boutique dans le contexte actuel. "Si la situation perdure, nous nous avançons vers une crise sociale", prédit-il.
"La situation qui prévaut aujourd'hui au Nigéria, c'est ça qui déteint sur les activités au niveau du Bénin. Donc, tant que la situation de l'autre côté ne va pas s'améliorer, sans être un oiseau de mauvais augure, je dirai que le bout du tunnel n'est pas pour tout de suite. Le stock de produits chez nous étant invendu, c'est une situation qui a des répercussions sociales", explique le boutiquier béninois.
Première conséquence de la fermeture des frontières nigérianes, le prix de l’essence de contrebande flambe au Bénin. De 325 francs CFA mardi, le jour de la fermeture, il a grimpé jusqu’à 600 francs CFA dans certaines localités, notamment à Cotonou et Porto Novo, la capitale.
Lire aussi : Scènes de déguerpissement au BéninDans les communes plus éloignées de Cotonou, le litre d'essence est passé à 900 francs CFA pendant qu'ailleurs il est carrément inexistant.
Pour la population béninoise, qui dépend en majorité du Nigeria pour son d’approvisionnement en carburant, la fermeturede la rontière constitue un coup dur. Et sans un communiqué officiel du gouvernement pour expliquer la situation, les spéculations vont bon train.
Hamidou, un conducteur de taxi moto, pense que le gouvernement béninois est à la base de cette situation. "Si l'Etat bannit la vente de l'essence de contrebande, beaucoup se retrouveront au chômage", a souligné Hamidou avant d'inviter le gouvernement à se pencher sur la situation, se lamantant:
"Si l'État bannit l'essence frelatée, de quoi vont vivre toutes ces personnes ? Voilà qu'il y a des jeunes diplômés comme vous et moi qui vivons de ça".
La mesure décrétée par les autorités nigérianes pourrait entraîner, dans les prochains jours, une pénurie d’essence dans les rues et de longues files d’attente dans les stations-services béninois, où l'essence se vend à 535 francs CFA le litre..
La flambée du prix de l’essence aura un impact réel sur les activités et le coût de vie de la population, qui se laisse aller à toutes sortes de spéculationss. Pour elle, "l'État doit créer une mesure sociale avant de supprimer subtilement la vente de l'essence de contrebande".
"Où est la mesure sociale qu'ils ont mise en place pour nous permettre d'acheter l'essence à moindre coût ? S'ils veulent lutter contre ça, il va falloir qu'ils subventionnent."
Environ 20% du budget général du Bénin provient des taxes que perçoit la Douane sur le commerce entre le Bénin et le Nigéria. Si cette situation perdure, le budget de l’État va encaisser un coup fatal, pense le professeur John Igue. Pour lui "la fermeture unilatérale de la frontière est une surprise quand on sait les relations qu'il y a entre les deux pays".
"De tous les États qui entourent le Nigeria, le pays qui a des relations extrêmement profondes avec lui sur le plan économique et des relations de voisinage, c'est le Bénin. Et de Lagos jusqu'à Cotonou, c'est un continuum d'habitats urbains. Il n'y a pas d'espaces agricoles vides. Dans un tel contexte, la frontière n'a pas de sens".
Pour sa part, le Nigeria explique la situation par le désir de renforcer la sécurité par un exercice mobilisant les principales institutions garantes de la sécurité du Nigeria.
"Toutes les personnes qui le désirent peuvent entrer et sortir librement des frontières tant qu’elles ont des raisons légitimes d’y être et qu'elles disposent d'un passeport", a souligné un communiqué du service des douanes nigérianes.