Flambée de violence au Nicaragua où la police démantèle des barricades

Un manifestant masqué fait exploser son mortier artisanal dans le quartier de Monimbo lors d'affrontements avec la police, à Masaya, au Nicaragua, le 2 juin 2018.

La police anti-émeute et les milices paramilitaires pro-gouvernementales ont attaqué lundi à l'est de Managua les barricades dressées par les manifestants, plongeant cette zone de la capitale nicaraguayenne dans le chaos pour tenter de mater un soulèvement contre le président Daniel Ortega, toujours silencieux.

Le gouvernement a semble-t-il lancé une offensive en plusieurs points pour tenter de démanteler les barrages qui bloquent des axes de circulation vitaux pour l'économie du pays, selon des sources concordantes.

"L'objectif est de reprendre le contrôle de la voie panaméricaine", qui traverse le pays, a estimé un représentant des manifestants, sous couvert d'anonymat.

Des tirs d'armes à feu ont notamment éclaté dans la capitale, Managua, où la télévision locale a diffusé des images des forces de sécurité poursuivant à pied ou en camions de jeunes manifestants.

Les militants, soulevés depuis près de deux mois, tentaient de les repousser par des jets de pierres et des tirs de mortiers artisanaux.

Depuis le début des manifestations, le 18 avril, 139 personnes ont été tuées dans des affrontements avec les forces de sécurité et des milices armées fidèles au président Ortega, selon le Centre nicaraguayen des droits de l'homme (Cenidh).

Les forces gouvernementales ont fait irruption lundi dans sept quartiers, démantelant les barrages érigés sur l'avenue centrale Juan Pablo II, qui traverse la capitale du nord au sud, ont témoigné des manifestants.

D'autres opposants retranchés à Sébaco, à 90 kilomètres au nord de Managua, ont également essuyé un assaut policier, tout comme à Las Maderas, située au 52e kilomètre de la voie panaméricaine nord, où une barricade a été démantelée, a constaté une équipe de l'AFP.

Dans un incident séparé, aux circonstances encore mal élucidées, trois personnes dont deux policiers ont été tuées à l'extrême-nord du pays dans l'assaut d'un commissariat par une bande d'hommes armés, a-t-on indiqué de source policière.

"Très dangereux"

Un évêque auxiliaire de Managua, Silvio Jose Baez, a demandé à la population de rester à l'abri. "C'est très dangereux, en raison de la présence de gangs violents", a-t-il écrit sur Twitter. "Ne risquez pas votre vie en vain".

Ce regain de violence intervient alors que les efforts de médiation de l'épiscopat catholique en faveur de l'ouverture de négociations semblent être restés vains.

Daniel Ortega, à la tête du pays depuis 2007, après un premier mandat de 1979 à 1990, est silencieux depuis jeudi, jour de sa rencontre avec les évêques afin de trouver une sortie de crise.

A l'issue de cette réunion à huis-clos, il avait requis un "temps de réflexion" pour examiner la proposition de médiation de l'Eglise.

Les barricades -- gardées en général par des jeunes armés de frondes et de mortiers artisanaux -- se sont multipliés dans tout le pays ces dernières semaines, paralysant les transports et les échanges commerciaux.

Cette vague de contestation sans précédent contre le héros de la révolution sandiniste, qui avait renversé la dictature en 1979, a été déclenchée par une réforme des retraites abandonnée depuis mais qui a tourné à un mouvement général de rejet à l'encontre de Daniel Ortega.

Il est accusé par ses détracteurs de brider les libertés et de confisquer le pouvoir. De son côté, il dénonce une "conspiration de l'opposition" visant à le renverser.

Avec AFP