Des commerces étaient ouverts et des voitures circulaient à Cayenne, principale ville de ce territoire français d'Amérique du Sud, où les stations essence ont été approvisionnées.
Plusieurs centaines de personnes, pour la plupart des enseignants, se sont rassemblées calmement dans la matinée devant le rectorat de Cayenne. "Ceux qui sont hors Cayenne n'ont pas pu passer les barrages", a observé un professeur de sport gréviste, qui s'"attendait à plus de monde".
L'affluence était moindre que les jours précédents autour des barrages routiers : quelques dizaines de manifestants empêchaient les voitures d'entrer ou sortir de Cayenne, là où des centaines d'entre eux se tenaient la veille.
"En France, l'image de la Guyane se résume à la délinquance mais il n'y a pas que cela. Le plus important c'est le chômage", a regretté, près d'un barrage, Pierre-Edouard, pestant contre l'absence de "réalisations" de "la droite comme de la gauche".
Le taux de chômage en Guyane, de 23% de la population active (contre 9,8% sur l'ensemble du territoire français), grimpe à 44% chez les jeunes de moins de 25 ans.
Trente-sept syndicats réunis au sein de l'Union des travailleurs guyanais (UTG) ont voté la "grève générale illimitée" qui vient de débuter et ils prévoient une "journée morte" mardi, selon le journal France-Guyane.
"La première priorité, c'est la lutte contre l'insécurité, le renforcement des moyens (...) compte tenu de la violence qui s'est hélas propagée" en Guyane, a déclaré lundi le président François Hollande, lors d'un déplacement à Singapour.
La Guyane détient le triste privilège d'être le territoire français le plus meurtrier par nombre d'habitants, avec 42 homicides commis en 2016.
- 'Ras-le-bol de la population' -
"Une délégation ministérielle sera sur place avant la fin de la semaine" pour conclure les discussions engagées par la mission de hauts fonctionnaires dépêchée samedi, a déclaré à Paris le Premier ministre, au côté de la ministre des Outre-mer Ericka Bareigts, qui a reconnu que la situation était "tendue" en Guyane.
"On a l'impression que le gouvernement ne perçoit pas le ras-le-bol de la population", a affirmé le sénateur PS de Guyane, Antoine Karam, sur BFMTV. "Aujourd'hui il y a encore 30% de la population qui n'a pas accès à l'eau potable ou à l'électricité", a-t-il souligné. "Nous ne sommes pas traités au même titre que les Français de l'Hexagone".
Dès dimanche, des barrages de poids lourds arboraient des slogans explicites : "Hollande, il est où ton pacte d'avenir ? Pas de routes, pas de développement".
Le Premier ministre, qui a appelé "solennellement au dialogue, à la responsabilité et à l'apaisement", a affirmé vouloir signer ce "pacte d'avenir" dans "les meilleurs délais".
L'envoi de membres du gouvernement était réclamé par des élus guyanais, ainsi que par le "collectif pou la Gwiyann Dekolé" ("pour que la Guyane décolle", en créole guyanais).
A quelques semaines du premier tour de l'élection présidentielle française, prévu le 23 avril, les candidats et leurs équipes se sont emparés de la situation de la Guyane et du sort fait à ses 260.000 habitants.
La candidate d'extrême droite Marine Le Pen a dénoncé le "service cruellement minimum" des gouvernements successifs vis-à-vis de la Guyane et annoncé vouloir renforcer les forces de sécurité dans le territoire, pour notamment lutter contre l'immigration illégale.
Le candidat de la droite François Fillon a évoqué "une situation extraordinairement dangereuse", et estimé que "la gravité de la situation impose aujourd'hui un dialogue direct entre le gouvernement et les élus et les habitants de la Guyane".
Bernard Cazeneuve s'en est pris de son côté à ceux qui cèdent à "la démagogie" et "l'électoralisme".
Avec AFP