Un manifestant tué lors de la journée "ville morte" à Conakry

La police se tient prête à disperser les manifestants à Conakry, en Guinée, le 6 février 2018.

Un jeune homme a été tué et d'autres personnes blessées à la fin d'une journée "ville morte" organisée lundi à Conakry par l'opposition guinéenne, qui a accusé la gendarmerie d'être responsable de ces violences.

Trois semaines après des élections locales dont les résultats sont contestés et après deux semaines de grève des enseignants, le climat social s'est encore alourdi lundi avec un appel à la grève générale lancée par le puissant syndicat UGTG.

"La ville était vraiment morte. Aucune activité économique. Aucun marché n'a ouvert. Aucune boutique. Aucun taxi n'a roulé. Tout le monde a observé le mot d'ordre", a déclaré dans la soirée le chef du principal parti de l'opposition, l'UFDG, l'ancien Premier ministre Cellou Dalein Diallo.

Alors que la journée touchait à sa fin, "les gendarmes sont rentrés dans les quartiers, ils ont renversé les marmites, agressé des citoyens et, malheureusement, tué encore un jeune étudiant", a ajouté M. Diallo, qui a réclamé les "vrais" résultats des élections locales du 4 février.

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Selon une source hospitalière interrogée par l'AFP, la victime, "Boubacar Sidy Diallo, âgé de 32 ans, a été tué par balle à Conakry et d'autres ont été blessés, dont deux étaient toujours aux soins intensifs".

Dès le début de la journée, des milliers de jeunes avaient érigé des barricades et brûlé des pneus dans les rues de Conakry à l'appel de l'UFDG, arrivé en deuxième position derrière le RPG, la formation du président Alpha Condé, lors d'un scrutin suivi par des violences post-électorales qui ont fait une dizaine de morts.

"Ce n'est que le commencement. L'opposition ne reculera pas jusqu'à ce qu'elle soit rétablie dans ses droits", a expliqué devant la presse le chef de file de l'opposition, ajoutant avoir "discuté" avec le médiateur de la République, l'ancien Premier ministre Mohamed Saïd Fofana, et le conseiller personnel du chef de l'Etat, Tibou Kamara.

Ecoles vides

"Il y a eu des promesses, mais à ce stade, je n'ai absolument rien obtenu. Nous restons sur nos positions et nous continuerons à organiser des manifestations", a-t-il affirmé.

La Commission électorale nationale indépendante (Céni) a invité les partis contestataires des résultats à des "séances de rencontres à partir de jeudi", dont la première se fera avec une délégation de l'UFDG, selon un communiqué diffusé dans la soirée.

Des voitures ont été caillassées et un bus de transport en commun appartenant à un propriétaire privé incendié à Matoto, dans le sud de la capitale. Des troubles se sont aussi déroulés dans des quartiers de la capitale guinéenne traditionnellement hostiles au régime comme Cosa, Bambéto ou Wanidara, où tous les commerces étaient fermés, selon des journalistes de l'AFP.

Au grand marché de Madina, poumon économique de Conakry, la quasi totalité des commerces étaient fermés, tandis que la circulation tournait au ralenti dans le centre administratif de la capitale.

Les écoles de Conakry étaient également à nouveau vides lundi. Depuis deux semaines, une faction dissidente du Syndicat libre des enseignants et chercheurs de Guinée (SLECG) a relancé un mouvement de grève entamé peu après la rentrée scolaire et qui a été lui aussi émaillé de manifestations meurtrières.

Les leaders syndicaux, non reconnus par l'Etat, réclament une augmentation des salaires des enseignants de 40% avec effet rétroactif. Un de ses porte-parole a déclaré que la grève se poursuivrait malgré l'annonce samedi par le gouvernement d'une augmentation de 10% des traitements des enseignants.

La grogne sociale s'est étendue lundi à l'ensemble de l'économie, à l'appel de l'Union générale des travailleurs de Guinée (UGTG), qui dénonce en vrac une mauvaise gestion de la sécurité sociale, des licenciements arbitraires dans plusieurs entreprises, la politisation de l'administration, les entraves à la liberté syndicale ou encore "l'indifférence" perçue de l'Etat face aux accidents de travail.

Le puissant syndicat a appelé les travailleurs de tous les secteurs (public, privé, mixte, informel) à arrêter le travail sur l'ensemble du pays "jusqu'à la satisfaction" de ses revendications.

Avec AFP