L'ONU suspendue à la venue du gouvernement syrien à Genève

Un garçon retire une chaise des décombres d'un immeuble après un raid aérien dans la ville de Mesraba, un bastion rebelle à l'est de la capitale Damas, en Syrie, le 26 novembre 2017.

L'émissaire onusien Staffan de Mistura a annoncé au Conseil de sécurité n'avoir toujours pas de confirmation de la venue à Genève des représentants du gouvernement syrien pour de nouvelles discussions mardi avec l'opposition sur l'avenir du pays.

"Le gouvernement n'a pas encore confirmé sa participation aux négociations à Genève mais a indiqué qu'il nous contacterait très bientôt", a déclaré l'envoyé spécial de l'ONU, lors d'une vidéo-conférence avec le Conseil de sécurité. Plusieurs fois reportées, les négociations doivent débuter formellement mardi.

"Hier soir, nous avons reçu un message nous indiquant que le gouvernement n'allait pas se rendre à Genève aujourd'hui (lundi). Bien évidemment, nous espérons et nous nous attendons à ce que le gouvernement se mette en route très bientôt".

"Si les deux parties arrivent à Genève, nous allons pouvoir nous lancer dans des discussions de fond et je l'espère aussi dans des négociations", a poursuivi l'émissaire, en se félicitant de voir la venue en Suisse d'une opposition "unie".

"Nous n'allons accepter aucune condition préalable d'aucune des deux parties", a aussi insisté Staffan de Mistura.

Tous les rounds de discussions à Genève ont buté jusqu'à présent sur le sort à réserver au président Bachar al-Assad. Les Occidentaux, notamment la France et les Etats-Unis, ne font cependant plus de son départ une condition préalable à un accord de paix.

L'opposition syrienne, qui est parvenue pour la première fois la semaine dernière en Arabie saoudite à former un comité unifié pour les négociations de Genève, semble être désormais sur la même ligne et ne réclame plus en préalable qu'il quitte ses fonctions.

Réunion à cinq

Une "réunion préparatoire" des cinq membres permanents du Conseil de sécurité - Etats-Unis, Russie, Chine, France et Royaume-Uni - se tiendra mardi à Genève à l'initiative de Paris, a aussi annoncé Staffan de Mistura.

Cette rencontre semble s'inscrire dans une volonté des Occidentaux de reprendre la main sur le dossier syrien face à la diplomatie hyperactive de Moscou, soutenu par Ankara et Téhéran, et ses victoires militaires en soutien de Damas.

Paris plaide depuis des mois pour la création d'un groupe de contact sur la Syrie, sans guère de retour positif jusqu'à présent ni de Moscou ni de Washington.

Staffan de Mistura a aussi précisé que "plus de 200 représentants de la société civile syrienne seront présents à Genève dans les prochaines semaines". Il y aura également des experts en droits de l'Homme pour évoquer les détentions, rapts et disparitions, et des spécialistes constitutionnels.

"Nous devons être au plus près des problèmes sur le terrain, c'est indispensable pour les efforts de médiation", a-t-il dit.

Lundi, l'ambassadeur français à l'ONU, François Delattre, s'est vivement élevé contre la poursuite d'attaques du régime syrien sur la Ghouta orientale, région rebelle proche de Damas. Au moins 14 personnes sont mortes lundi et "c'est inacceptable", a-t-il dit.

Staffan de Mistura a fixé pour la 8e session de pourparlers intersyriens quatre sujets: création d'une "gouvernance crédible, inclusive et non-sectaire"; élaboration d'une nouvelle Constitution avec un "dialogue ou une conférence nationale"; préparation d'élections "sous la supervision des Nations unies" et discussions sur "la lutte contre le terrorisme".

250 milliards

"En tant que médiateur, je vais m'assurer de la façon dont les parties négocient et travaillent positivement à la mise en oeuvre des négociations, et cela peu importe les déclarations publiques faites sur tel ou tel sujet".

"Nous savons très bien qu'il y a des différences entre ce qui est dit en public et ce qui se passe dans des négociations". "Il est tout à fait possible également de dire des choses qui ne plaisent pas à l'autre partie, à condition de ne pas établir et de ne pas fixer de pré-conditions. C'est là l'essence des négociations", a fait valoir l'émissaire.

Après "six ans de guerre et la moitié de la population (ayant) quitté le pays", la "reconstruction devrait nous coûter 250 milliards de dollars", a aussi indiqué Staffan de Mistura. "Il y a une kyrielle d'obstacles, un vaste éventail d'acteurs, des intérêts divergents ainsi qu'un véritable danger de voir un cloisonnement des territoires et une mise en péril de l'intégrité territoriale et de l'autonomie" de la Syrie, a-t-il mis en garde.

De la répression sanglante par le régime de Bachar al-Assad de manifestations prodémocratie, point de départ de la guerre, à l'intervention de puissances internationales, la guerre en Syrie dure depuis mars 2011. Elle a fait plus de 340.000 morts et des millions de déplacés et de réfugiés.

Avec AFP