Une délégation de l'opposition est entrée dans les locaux de la Cour constitutionnelle. Un ballet incessant d'hommes en costumes transportant des dossiers s'est ensuite produit.
"Nous nous reposerons quand ce pays sera libre", a affirmé Jameson Timba, ancien député, membre de la délégation.
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Le scrutin, le première depuis la chute du leader historique Robert Mugabe, a été remporté par Emmerson Mnangagwa (50,8%) devant le leader du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), Nelson Chamisa (44,3%).
"Nos avocats ont déposé avec succès notre recours. Nous avons un bon dossier et une bonne cause!", a twitté M. Chamisa.
La Cour constitutionnelle a 14 jours pour trancher.
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"Toutes les preuves (de fraude) dont nous avons besoin sont disponibles. Il n'y aura aucun doute pour tous les citoyens. Il y a eu une triche et une fraude de +mammouth+", avait affirmé mercredi Thabani Mpofu, avocat du MDC.
De son côté, le président Mnangagwa se montre confiant, répétant que l'élection a été "juste et transparente". Son camp accuse les opposants d'être "mauvais joueurs".
La plupart des observateurs sont plutôt sceptiques quant aux chances de l'opposition d'obtenir satisfaction devant les tribunaux.
"La justice au Zimbabwe a un long passé de partialité favorable à la Zanu-PF et il est peu probable que les juges, dont beaucoup doivent leurs postes au parti au pouvoir, prennent des décisions favorables à l'opposition", estime Alexander Noyes, spécialiste Afrique du Center for Strategic and International Studies (CSIS).
Certains soulignent que l'opposition n'a pas forcément les moyens de démasquer des fraudes. D'autres estiment qu'Emmerson Mnangagwa a peut-être tout simplement gagné l'élection.
Deux jours après les élections, l'opposition était descendue dans les rues d'Harare pour dénoncer la fraude, selon elle, lors de la présidentielle. L'armée avait tiré à balles réelles, faisant au moins six morts.
En parallèle, Tendai Biti, figure de l'opposition, comparaissait vendredi devant la Cour, au lendemain de son expulsion de Zambie où il avait vainement tenté de demander l'asile politique.
Les avocats de Tendai Biti veulent que le parquet abandonne les poursuites contre lui pour "proclamation illégale de résultats électoraux" et "violence sur la voie publique", ainsi que l'accusation d'avoir tenté d'échapper à la justice.
"J'ai déjà été arrêté à de nombreuses reprises ces dernières années. Ma maison a été attaquée deux fois avec un cocktail Molotov, mais je ne me suis jamais senti aussi menacé qu'au cours des sept derniers jours", a déclaré Tendai Biti devant le tribunal, où il comparaissait libre après avoir bénéficié la veille d'une libération sous caution.
"Nous allons présenter à la cour des preuves du harcèlement dont sont victimes M. Biti, sa mère et ses amis", avait souligné un peu plus tôt l'une de ses avocates, Beatrice Mtetwa.
"Cela l'a conduit à penser que sa vie était en danger. Il a donc cherché asile en Zambie", a-t-elle déclaré, estimant que son arrestation était un "enlèvement" et une "violation sérieuse des lois sur les réfugiés".
Les organisations de défense des droits de l'homme et la communauté internationale s'inquiètent toujours du déploiement policier qui maintient la capitale et ses banlieues sous tension.
Le président Mnangagwa, qui a dirigé sous Robert Mugabe la brutale répression (20.000 morts) dans les provinces dissidentes du Matabeleland (ouest) et des Midlands (centre) en 1983, a promis la semaine dernière une enquête indépendante sur les violences post-électorales.
Au pouvoir depuis novembre et l'éviction de Mugabe, il tente de montrer des signes d'ouverture et de donner des gages de bonne volonté.
Il a affirmé jeudi sur Twitter que Tendai Biti avait été libéré après son intervention personnelle.
Mais vendredi, la commission zimbabwéenne des droits de l'homme a dénoncé "la chasse et le harcèlement d'agents électoraux représentant des candidats indépendants ou des partis d'opposition".
Dans un communiqué commun jeudi, les missions diplomatiques de l'Union européenne, des Etats-Unis, de l'Australie et du Canada s'étaient dites "profondément inquiètes des informations incessantes reçues selon lesquelles des membres de l'opposition sont visés par les forces de sécurité".
Avec AFP