Sept mois après les attentats de Paris et de Saint-Denis, la menace jihadiste reste toujours "élevée", répète le gouvernement. Et l'Euro constitue "une cible potentiellement attractive, tant pour les organisations terroristes que pour des personnes radicalisées". Mais pas question "de se laisser impressionner", a affirmé dimanche le président François Hollande, qui a assuré avoir mobilisé les forces de l'ordre pour "que la sécurité soit garantie".
Pour les responsables de la lutte antiterroriste, en revanche, "tous les voyants sont au rouge". "La France est clairement le pays le plus menacé", selon le patron du renseignement intérieur Patrick Calvar.
"On sait qu'il y a des commandos en Europe dont personne ne connaît ni la composition ni la localisation. Les cellules qui sont tombées à Bruxelles ne visaient pas l'aéroport et le métro de Bruxelles mais Paris", explique un haut responsable, sous couvert d'anonymat. "Autre raison d'être pessimiste, le groupe Etat islamique (EI) perd pied, donc il fera des actions, là-bas ou en France".
Alors que l'Euro coïncide en grande partie avec le ramadan, l'EI a en outre menacé les États-Unis et l'Europe d'attaques au cours du mois du jeûne musulman.
Mais la menace ne se cantonne pas aux jihadistes: les services ukrainiens ont affirmé lundi avoir arrêté le 21 mai un Français en possession d'un arsenal qui préparait 15 attentats en France pendant la compétition, avec des motivations anti-islam et anti-immigration. Une affaire sur laquelle les autorités françaises se sont montrées jusqu'ici très réservées.
Plus de 90.000 personnes sur le pont
Plus de 77.000 policiers et gendarmes, une partie des 10.000 soldats de l'opération Sentinelle - versant militaire de Vigipirate - et 1.000 secouristes bénévoles sont mobilisés. Si à l'intérieur des stades et dans les hôtels, la sécurité incombe à l'organisateur (Euro 2016 SAS), celle des fan zones est confiée aux collectivités locales. Avec des policiers et des gendarmes en nombre en "protection périphérique" et pouvant intervenir à l'intérieur. Les unités d'élite de la police et de la gendarmerie, Raid et GIGN, seront engagées aux abords des événements.
Côté sécurité privée, le responsable de la sécurité de l'Euro Ziad Khoury, a estimé que "le vivier humain mobilisé sur la compétition va se situer entre 10 et 15.000 agents" au total.
Des simulations d'attentats ont été menées dans des stades et des fan zones et de multiples scenarii ont été envisagés, y compris un attentat par drone. "Un dispositif anti-drone assez conséquent et innovant" sera mis en place, selon Ziad Khoury.
Des fan zones sous haute surveillance
Critiquées par la droite parce qu'elles constitueraient une cible de choix, les fan zones sont destinées à accueillir sept millions de visiteurs qui pourront y suivre les matches en direct et faire la fête dans les dix villes hôtes (Bordeaux, Lille, Lens, Lyon, Marseille, Nice, Paris, Saint-Denis, Saint-Etienne et Toulouse). Censées canaliser les supporters, elles seront surveillées et leur accès filtrés. La plus grande fan zone, d'une capacité de 92.000 supporteurs, est installée à Paris, sur le Champ-de-Mars.
Si les retransmissions de matches dans des espaces publics non sécurisés sont proscrites, les bars et les terrasses, des "cibles molles" visées le 13 novembre, devraient attirer en nombre les amateurs de ballon rond.
"Le nombre de cibles est infini. N'importe quel bar dans lequel des gars regardent le match. Donc il faudrait tout protéger tout le temps et c'est bien entendu impossible", estime un haut responsable policier.
Mercredi, le gouvernement a lancé une application pour smartphone visant à alerter la population en cas d'attentat.
Matches à risque et hooligans
Au-delà de la menace d'attentat, les autorités devront gérer comme à chaque compétition le risque de débordements provoqués par des supporters violents. Plusieurs pays en lice sont souvent accompagnés de hooligans (Russie, Croatie, Angleterre, Allemagne...).
De sources policières, cinq matches du premier tour feront l'objet d'une vigilance renforcée: Angleterre - Russie (le 11 juin à Marseille), Turquie - Croatie (le 12 à Paris), Allemagne - Pologne (le 16 au Stade de France), Angleterre - Pays de Galles (le 16 à Lens) et Ukraine - Pologne (le 21 juin à Marseille).
Quelque 180 policiers de 23 pays participant à la compétition sont déployés en renfort pour aider à traquer les hooligans. Le gouvernement a pris des mesures administratives pour empêcher l'entrée en France de supporters violents interdits de stade dans leur propre pays.
Avec AFP