KINSHASA (Reuters) - Le Sénat de la République démocratique du Congo (RDC) a modifié vendredi l'article de la nouvelle loi électorale qui prévoyait l'organisation d'un recensement de la population en préalable à la tenue de la prochaine élection présidentielle, à l'origine des violentes manifestations des derniers jours.
L'opposition congolaise craignait que cette clause ait pour conséquence de repousser de plusieurs années le scrutin prévu pour 2016 et de permettre ainsi au président Joseph Kabila, qui ne peut se représenter une troisième fois, de se maintenir plus longtemps au pouvoir. Le sénat a voté une version modifiée de l'article 8 de la loi, qui précise que la mise à jour de la liste électorale devra être terminée dans le délai prévu par la constitution pour la tenue des élections législatives et présidentielle.
L'adoption de la loi originelle par la chambre basse du Parlement le week-end dernier a provoqué de violents heurts entre manifestants et forces de l'ordre, qui ont fait au moins 42 morts, selon la Fédération internationale des ligues de droits de l'homme (FIDH). "Nous avons écouté la rue. C'est pourquoi le vote d'aujourd'hui est un vote historique", a déclaré le président du Sénat, Léon Kenga Wa Dondo, à l'issue du vote des sénateurs. "Les amendements contenus dans cet article sur les données démographiques ne parlent plus de recensement (...) car le recensement aurait peut-être excédé la limite de temps prévue par la constitution", a-t-il dit.
Une commission mixte est désormais chargée de fusionner les deux textes avant un vote définitif de la loi qui devrait intervenir d'ici à la fin de la session parlementaire, lundi prochain. Mais les partisans de l'opposition n'ont pas attendu pour exprimer leur satisfaction dans les rues de Kinshasa. Plusieurs dizaines d'entre eux ont investi la rue du Commerce, au coeur de la capitale, aux cris de "Victoire, victoire!" après la retransmission du vote du Sénat à la télévision. "Le Sénat a montré sa sagesse en épargnant le sang du peuple congolais qui s'apprêtait à couler", a déclaré l'un d'eux, un commerçant de 45 ans se faisant appeler Mbuyi.
La France, les Etats-Unis et le secrétaire général de l'Onu Ban Ki-moon avaient appelé les autorités congolaises à ne pas repousser les élections. "C'est un coup dur pour Kabila et ses partisans", estime l'analyste politique Pascal Kambalé, ancien directeur pour la RDC de l'Open Society Initiative for Southern Africa. "Leur seul objectif est de faire en sorte que Kabila reste au pouvoir après 2016. Mais ils n'ont pas de stratégie claire pour parvenir à ce résultat", souligne-t-il.