La Zambie, 2e producteur de cuivre, n'arrive plus à rembourser ses dettes

Des ouvriers effectuent des travaux sur une route près de la capitale zambienne, Lusaka, le 15 novembre 2013.

Au bord de la banqueroute, la Zambie, dont l'économie fragile a plongé avec la crise sanitaire, négocie une aide financière auprès du Fonds monétaire international pour alléger le remboursement de sa dette, ouvrant la voie aux autres pays pauvres du continent.

Ce pays enclavé d'Afrique australe est devenu fin 2020 le premier pays africain en défaut de paiement depuis le début de la pandémie de Covid-19.

Riche en ressources naturelles et deuxième producteur de cuivre d'Afrique, la Zambie a souffert de la dégringolade du cours des matières premières, avec l'arrêt brutal de l'économie mondiale lié à la pandémie.

En novembre, le pays n'a pas pu verser 33,7 millions d'euros d'intérêts sur une dette libellée en euros. Fin janvier, nouvelle échéance manquée de 46,2 millions d'euros sur un autre emprunt obligataire.

Très endettée auprès de la Chine, la Zambie, qui compte 17 millions d'habitants, a une dette extérieure exponentielle estimée à 10 milliards d'euros, dont la moitié auprès de créanciers privés.

Un accord avec l'institution de Bretton Woods pourrait aboutir à un prêt à taux zéro ou très faible pour rembourser la dette, assorti d'un soutien technique pour des réformes économiques.

Les négociations qui doivent durer jusqu'au 3 mars "sont en cours", a confirmé le FMI à l'AFP.

"Question de priorités"

Mais selon les experts, Lusaka devra être exemplaire pour obtenir un tel accord.

"Le FMI veut que la Zambie soit transparente sur sa dette et mette en place des mesures d'austérité", explique à l'AFP Aleix Montana, chercheur à la société de conseil Verisk Maplecroft.

Annulation de projets de construction, baisse des dépenses, hausse du taux d'intérêt directeur ... "Des mesures sont prises pour réduire la dette du pays", a assuré la semaine dernière le gouverneur de la Banque centrale zambienne, Christopher Mvunga.

Le président zambien Edgar Lungu participe à une discussion lors de la réunion du Forum économique mondial sur l'Afrique 2017 à Durban, Afrique du Sud, le 4 mai 2017.

Mais avec des élections présidentielles et législatives prévues en août, le président Edgar Lungu qui a accumulé des dettes massives ces dernières années, notamment pour des grands projets d'infrastructures, a d'autres priorités.

"La Zambie se sent obligée de continuer à investir dans des projets d'infrastructures populaires pour assurer la réélection du président", explique M. Montana.

La Zambie a aussi officiellement demandé la restructuration de sa dette auprès du G20. En pleine crise sanitaire, les vingt pays les plus riches de la planète, dont la Chine, se sont accordés dans des conditions encore floues pour permettre aux économies les plus fragiles de renégocier leur dette.

"Opaque"

La décision du FMI d'accorder des facilités de paiement à la Zambie pourrait alors influencer les pays du G20 sur ce qu'ils pourraient accorder aux pays pauvres.

L'enjeu est de taille pour l'Afrique, car plusieurs pays du continent sont en grande difficulté depuis le Covid. La Zambie est le 3e pays du continent à demander une restructuration de sa dette auprès du G20, après l'Éthiopie et le Tchad.

Mais il y a des inquiétudes concernant "des dettes non déclarées", en particulier auprès de prêteurs commerciaux en Chine, met en garde Mark Bohlund, analyste crédit chez REDD Intelligence.

La Chine concentre aujourd'hui 63% des dettes dues aux pays du G20, selon la Banque mondiale. En vingt ans, des milliards de dollars partis de Chine via l'ancienne route de la soie, ont financé des ponts, des stades, des hôpitaux africains, par le biais d'accords souvent opaques.

Le montant total de la dette zambienne pourrait être encore supérieure aux estimations officielles ... Et la moitié de cette dette, contractée auprès de créanciers privés, est difficilement contrôlable.

"Ces entreprises gèrent souvent l'argent des autres", explique M. Bohlund. "Elles ne peuvent pas décider de l'allègement de la dette parce que ce n'est pas leur argent".

Dans ce contexte, les observateurs craignent que le FMI fournisse un soutien financier aux pays pauvres, sans pour autant parvenir à obliger les créanciers privés notamment chinois à effacer une partie des dettes.

"Un soutien du FMI pourrait alors servir à renflouer le secteur privé, ce que nous ne voulons pas", met en garde Iolanda Fresnillo, du Réseau européen sur la dette et le développement (Eurodad).