L'ONU au chevet d'une des pires crises humanitaires de la planète au Lac Tchad

Vue aérienne de Lac Tchad et du village de Ngouboua en février 2015

Les représentants du Conseil de sécurité de l'ONU vont se rendre jeudi au lac Tchad, dans le but d'attirer l'attention sur une des plus graves crises humanitaires de la planète, qui combine famine, attaques djihadistes, changement climatique et mauvaise gouvernance.

Cette crise touche quelque 21 millions de personnes réparties dans quatre pays: le Nigeria, le Tchad, le Cameroun et le Niger.

La visite des 15 ambassadeurs du Conseil de sécurité doit aussi ouvrir la voie à une action plus forte de l'organe exécutif de l'ONU pour tenter de résoudre une crise largement ignorée par la diplomatie mondiale quand les conflits en Syrie et au Soudan du Sud s'intensifient.

La visite "portera l'attention internationale sur la crise humanitaire" au lac Tchad, où les donateurs réclament de nouveaux financements, a affirmé l'ambassadeur du Royaume-uni à l'ONU, Matthew Rycroft.

La crise est "largement ignorée" et le Conseil de sécurité a été "sans doute un peu lent à s'attaquer à la menace (du groupe djihadiste) Boko Haram", a expliqué à l'AFP M. Rycroft.

Conduite par le Royaume-Uni, la France et le Sénégal, le Conseil de sécurité rencontrera les dirigeants, des représentants de la société civile et se rendront dans des camps de réfugiés au Cameroun et dans le nord-est du Nigeria. Ces crises ont déplacé quelque 2,3 millions de personnes.

La visite commencera au Cameroun, une semaine après que le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres eut tiré le signal d'alarme sur la menace de famine dans le nord-est du Nigeria, épicentre du conflit avec Boko Haram.

Les Nations unies cherchent 1,5 milliard de dollars en 2017 pour la région du lac Tchad - dont près de la moitié pour le nord-est du Nigeria, où 5,1 millions de gens manquent de nourriture.

Tempête de défis

Le groupe Boko Haram a pris les armes en 2009 dans le but de créer un Etat islamique dans le nord-est du Nigeria mais le mouvement s'est étendu depuis et mène fréquemment des attaques suicide.

Le deuxième plus grand producteur de pétrole d'Afrique est parvenu à contrer militairement l'offensive des djihadistes mais les civils en ont payé le prix fort.

A la mi-janvier, 112 civils et travailleurs humanitaires sont morts dans un bombardement accidentel de l'armée nigériane censé viser des combattants de Boko Haram.

S'ajoutent aussi à ces crises le changement climatique et la croissance de la population qui ont transformé le lac Tchad, une des plus grandes réserves d'eau d'Afrique, en un désastre environnemental.

Son volume d'eau n'est plus qu'à 10% de son niveau des années 1960.

Les ambassadeurs encourageront les quatre pays touchés à trouver une nouvelle stratégie pour sortir de cette crise aux multiples facettes, a expliqué l'ambassadeur de la France à l'ONU, François Delattre.

"Le Conseil encouragera (...) les États de la région à adopter une approche globale pour traiter les causes profondes du terrorisme, notamment en matière de gouvernance et de développement", a-t-il déclaré.

La Suède, membre non permanent du Conseil de sécurité et grand donateur humanitaire, espère que le Conseil sera plus actif pour résoudre la crise.

La région du lac Tchad a été touchée par une "véritable tempête" de défis: "le terrorisme, la contrebande, un sous-développement grave, mais aussi les effets du changement climatique", a expliqué Carl Skau, diplomate suédois à l'ONU.

"Ca ne peut pas être ponctuel. Nous avons besoin d'un suivi sérieux", a-t-il ajouté.

Quatorze pays ont déjà promis 672 millions de dollars au lac Tchad, lors d'une conférence de donateurs à Oslo la semaine dernière, des promesses considérées par l'ONU comme un bon départ.

Avec AFP