L’Afrique, inondée de déchets électroniques

Les vieux ordinateurs, et autres gadgets, finissent très souvent en Afrique

Des responsables africains rassemblés récemment à Yaoundé par Interpol, la police criminelle internationale, ont fait le constat suivant : la majorité des produits électroniques distribués en Afrique proviennent des pays industrialisés, et sont des produits d’occasion qui viennent contaminer les sols et voies d’eau du continent. Un trafic qu’il s’agit de juguler.

Interpol s’est dotée depuis longtemps d’un programme environnemental pour lutter contre la criminalité multiforme dans ce secteur. En ce qui concerne l’Afrique, on songe non seulement au dumping des produits électroniques périmés, mais encore à la pêche illicite ou au trafic de l’ivoire.

Lemnyuy William de la Direction des études, des projets et de la coopération au ministère camerounais de l’Environnement et de la Protection de la Nature, fait valoir qu’il est temps pour les pays africains de cesser de servir de dépotoir. Car le continent n’est pas équipé pour neutraliser les déchets d’équipements électriques et électroniques.

« Nous n'allons pas continuer à servir de dépotoir pour les multiples équipements électroniques périmés de nombreux pays développés », a-t-il déclaré.

Environ 70 % des produits électroniques distribués en Afrique sont d’occasion, estime le bureau régional d’Interpol au Cameroun. C’est dû au fait que les Etats-Unis, tout comme l’Europe, se sont dotés de règlements très stricts sur le recyclage de ces produits. Il revient donc moins cher de les exporter vers l’Afrique que de les neutraliser sur place.
Rien qu’en 2012, selon le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUD), environ 220.000 tonnes de produits électroniques ont été expédiés de l'Union européenne (UE) vers l'Afrique de l'Ouest.

Le dumping de ces produits est particulièrement dangereux, souligne Leke Casimir, un spécialiste de la gestion des déchets électroniques

Les animaux mangent des déchets contaminés, ce qui peut rendre leur viande dangereuse à la consommation



« Un ordinateur est constitué d'environ mille éléments, tous toxiques. Quand il devient obsolète, il est jeté. A ce moment-là, il est infiltré par l'eau de pluie, qui introduit ces produits dans les systèmes aquatiques. Les gens transportent l'eau et la boive et cela les affecte. Ou les femmes utilisent l'eau contaminée des zones marécageuses pour arroser leurs légumes, que tout le monde va acheter au marché » explique M. Casimir. « Cela nous contamine sans qu’on le sache ».

Se faisant l’écho de l’expert, M. Lemnyuy rappelle que les déchets électroniques sont riches en métaux lourds, qui sont relâchés lorsqu’on brûle les déchets, ou qu’on les abandonne aux intempéries. Ces produits chimiques toxiques sont cancérigènes, dit-il.
La Convention de Bamako sur l'interdiction d'importer en Afrique des déchets dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontières et la gestion des déchets dangereux produits en Afrique - ou plus simplement, la Convention de Bamako - a été adoptée en 1991 avant d’entrer en vigueur en 1998.

Reste que sa mise en application laisse beaucoup à désirer. D’où la nécessité, affirment les organisations de la société civile, tout comme les autorités, de redoubler de vigilance.