Le beau-frère du roi d'Espagne reste libre pour l'instant

Diego Torres, ancien partenaire d'affaires du mari de la princesse Cristina d'Espagne Inaki Urdangarin à l'Institut Noos, et son épouse, Ana Maria Tejeiro, arrivent pour assister à une audience du procès à l'Académie des Baléares de l'administration publique (EBAP) à Palma de Majorque, aux Baléares, Espagne, 10 juin 2016. epa/ATIENZA

Le beau-frère du roi d'Espagne, Inaki Urdangarin, condamné à six ans de prison dans une affaire de corruption, a été laissé libre jeudi et pourra attendre en Suisse - où il réside - une décision définitive de la justice.

A Palma de Majorque, les trois juges qui l'avaient condamné la semaine dernière ont décidé, jeudi, de maintenir en liberté le mari de l'infante Cristina.

Il sera seulement contraint de se présenter le premier jour de chaque mois à une autorité judiciaire de son pays de résidence, la Suisse, et de communiquer ses éventuels séjours hors de l'Union européenne.

Bannis depuis des années de tous les actes officiels de la royauté, Cristina, 51 ans, et Inaki, 49, vivent à Genève depuis 2013 avec leurs quatre enfants.

A sa sortie du tribunal à la mi-journée, M. Urdangarin a dû essuyer des huées de manifestants qui l'ont traité de "chorizo", un terme populaire signifiant "voleur".

De leur côté, le roi Felipe VI et la reine Letizia étaient apparus tranquilles, dans la matinée, à l'inauguration d'une foire internationale d'art contemporain, comme si de rien n'était.

"L'affaire Noos" avait pourtant précipité l'abdication en 2014 de Juan Carlos 1er et l'arrivée sur le trône de son fils.

Le mari depuis 1997 de l'infante Cristina a finalement été condamné, le 17 février, à six ans et trois mois de prison et à une amende de 512.000 euros.

L'ancien champion olympique de handball était accusé d'avoir détourné entre 2004 et 2006 des subventions attribuées à la fondation qu'il présidait, l'institut Noos.

Sa défense a, depuis, indiqué son intention de faire appel du jugement qui le reconnaît coupable de prévarication, détournement de fonds publics, fraude fiscale, trafic d'influence...

En cas de détention, le journal en ligne El Español avait déjà décrit ce qui attendait Inaki et Cristina: 50 minutes de conversations téléphoniques et 40 minutes au parloir par semaine, une rencontre en cellule familiale une fois par mois...

Mais le tribunal a tranché: M. Urdangarin n'a pas à purger immédiatement sa peine et peut attendre une décision de la Cour suprême.

Son ancien associé, Diego Torres - condamné à la peine la plus lourde, 8 ans et six mois de prison - est également maintenu en liberté. Mais il s'est vu retirer son passeport et n'a pas le droit de quitter le pays.

Le procureur anticorruption Pedro Horrach avait changé de position en quelques jours: après avoir envisagé l'incarcération immédiate de M. Urdangarin, il a demandé son maintien en liberté contre paiement d'une caution de 200.000 euros, une condition que les juges n'ont finalement pas retenue.

Un avocat de Cristina de Bourbon, Pau Molins, a lui-même relevé cette évolution du parquet: "Le procureur avait dit qu'il allait demander l'incarcération, on dirait qu'il a revu nettement à la baisse ses prétentions".

L'infante Cristina avait, elle, été relaxée dans cette affaire, après avoir été soupçonnée de fraude fiscale. Elle a cependant dû payer une amende de 265.000 euros du fait de sa "responsabilité civile solidaire" avec son mari.

Les médias espagnols avaient estimé que planait sur ce scandale "l'ombre" de Juan Carlos 1er, roi d'Espagne de 1975 à 2014, réputé proche de son gendre.

Les juges avaient finalement conclu que M. Urdangarin avait très facilement obtenu des contrats - sans appel d'offres ni discussion des prix - en raison de "la position dont il bénéficiait, du fait de sa proximité avec le chef de l'Etat, lui qui faisait partie à l'époque de la famille du roi".

La décision de laisser libre le beau-frère de Felipe VI sans lui faire payer de caution risque d'être mal perçue dans un pays écoeuré par la corruption.

"L'injustice est inégale pour tous", a réagi sur Twitter le chef du parti de gauche radicale Podemos, Pablo Iglesias, jouant sur les mots.

"On écrira des chansons sur cette condamnation et ses auteurs seront condamnés", a-t-il lancé, en référence à la condamnation à trois ans et demi de prison infligée cette semaine à un rappeur espagnol, pour insulte à la couronne et apologie du terrorisme à travers des références au groupe indépendantiste armée basque ETA.

Avec AFP