Les Capverdiens votaient dimanche pour élire leurs députés lors de législatives à l'issue incertaine, où l'impact sévère de la pandémie sur le secteur touristique et l'économie risque de déterminer leur vote.
La pandémie de coronavirus a mis à terre l'économie de cet archipel très dépendant du tourisme, qui représente 25% de son PIB, le Cap-Vert ayant enregistré en 2020 une récession historique de 14,8%.
Aucun des deux partis historiques n'est donné favori dans l'archipel de 550.000 habitants, à environ 600 km au large du Sénégal, qui connaît une flambée de cas de coronavirus.
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Une nouvelle alternance est donc envisageable entre le Mouvement pour la démocratie (MpD, centre droit) du Premier ministre Ulisses Correia e Silva et le Parti africain pour l'indépendance du Cap-Vert (PAICV, socialiste) de Janira Hopffer Almada, qui ambitionne de devenir la première femme à diriger le gouvernement de cette ancienne colonie portugaise.
Les premiers résultats provisoires sont attendus en fin de soirée.
Un changement de majorité serait tout sauf inédit depuis l'instauration du multipartisme qui avait mis fin au régime du PAICV comme parti unique en 1990 et les premières élections libres de 1991. En 2016, le MpD avait défait le PAICV, au pouvoir depuis 15 ans, en s'assurant une majorité absolue de 40 sièges sur les 72 de l'Asssemblée nationale.
Dans la cour d'une école du centre de Praia, la capitale des files d'attente s'étaient formées dimanche matin devant les salles de classe servant de bureaux de vote.
A deux visages
Le vote, prévu de 07H00 (locales, 08H00 GMT) à 18H00 (locales, 19H00 GMT), a démarré avec retard dans certains bureaux. Les 392.993 électeurs doivent voter dans un contexte sanitaire tendu après une flambée de cas de coronavirus.
Avec 189 cas de Covid-19 pour 100.000 habitants, le Cap-Vert enregistre le plus fort taux d'incidence d'Afrique, selon une étude du Centre de contrôle et de prévention des maladies du continent (Africa CDC) portant sur la période du 5 au 11 avril.
Mais la pandémie semblait y avoir des effets sanitaires relativement contenus avec 20.254 cas de contamination et 190 décès).
"La priorité est pour moi de voir le gouvernement réélu, pour combattre le Covid, développer l'économie et le tourisme", a dit à l'AFP Luis Leit, 44 ans, après avoir voté à Praia.
Un autre électeur, se présentant comme un juriste sous le nom de Carla, a dénoncé "la corruption" dans ce pays réputé pourtant pour sa bonne gouvernance. Favorable à la liste conduite par Mme Almada, il appelle à "investir dans les secteurs clefs les plus touchés par la pandémie".
Pour relancer l'économie, les candidats ont promis la vaccination à une large partie de la population et des mesures pour diversifier les revenus du pays.
Jusque dans les rues de Praia, la capitale, où sont disséminées un peu partout les affiches des candidats, deux profils différents s'affrontent.
D'un côté, l'expérience. Ulisses Correia e Praia, 58 ans, ancien haut cadre de la banque du Cap-Vert, ex-ministre et ex-maire de Praia. Le chef du gouvernement soigne son image moderne, proche du peuple, vêtu de jeans et utilisant comme musique promotionnelle du rap et autres musiques rythmées.
Faiseur de roi?
De l'autre, Janira Hopffer Almada, 42 ans, qui a été deux fois ministre de la jeunesse. En 2014, l'avocate de formation est même devenue la première présidente (et la plus jeune) du PAICV, ex-parti unique.
Elle pourrait surtout devenir, en cas de victoire, la première femme et la plus jeune Premier ministre de l'archipel. Energique, Mme Almada a fait campagne sous le slogan "un Cap-Vert pour tous".
Si le Premier ministre s'est dit "confiant" mardi de l'emporter avec une majorité absolue, aucun parti ne semble tirer son épingle du jeu. La solution pourrait venir d'un faiseur de roi inattendu: l'Union capverdienne indépendante et démocratique (Ucid, démocrate-chrétien).
En 2016, le petit parti n'avait certes réussi à faire élire que trois députés, devenant ainsi le seul avec le MpD (40) et le PAICV (29) à siéger au Parlement. En cas de majorité relative, il pourrait faire basculer l'issue du vote. Trois autres petites formations sont également en lice.
Depuis les élections libres de 1991, le petit pays d'Afrique de l'Ouest réputé modèle de démocratie sur le continent n'a enregistré aucun incident ni violences liés aux élections et leurs résultats.
Le Cap-Vert est doté d'un régime semi-parlementaire où le Premier ministre domine l'exécutif, le président (Jorge Carlos Fonseca, MpD) exerçant un rôle d'arbitre.
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