Le géant français Castel cité dans de graves violations des droits humains en RCA

Les réfugiés musulmans lors d’une rencontre avec le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres (non visible), à Bangassou, Centrafrique, 25 octobre 2017.

Les leaders de l'entreprise étaient au courant des exactions commises par leurs alliés mais ils ont refusé d'agir.

Une filiale du Groupe Castel a financé et soutenu des milices violentes pour protéger ses intérêts commerciaux en Centrafrique, selon un rapport de l'ONG The Sentry, qui se spécialise dans la traque des financements illicites en zones de conflit.

Rendu public ce mercredi 18 août, le rapport de 49 pages accuse le géant de la bière d'avoir fait la sourde oreille malgré le fait que ses agents ont eu connaissance des brutalités extrêmes commises à l’encontre des civils.

Ces brutalités de la part des milices incluent des massacres, des viols, des actes de torture, des enlèvements, le recrutement d’enfants soldats, ainsi que des violences sexuelles.

La SUCAF et la société mère à Paris "ont été régulièrement informés des violations flagrantes des droits de l’homme commises par l’UPC. Malgré cette connaissance, l’enquête révèle que la direction de la SUCAF RCA a continué à fournir un soutien financier et logistique à des groupes criminels (principalement, mais pas exclusivement l’UPC) pendant plus de six ans, contribuant ainsi à alimenter le conflit armé en République centrafricaine", déplore le rapport. </p>

Le rapport indexe les miliciens du groupe armé l’Unité pour la paix en Centrafrique (UPC) qui, malgré leurs activités criminelles, ont bénéficié de l'appui financier de la Sucrerie Africaine de Centrafrique (SUCAF RCA), filiale du Groupe Castel, géant de l’agroalimentaire et des boissons qui génère plusieurs milliards de dollars de chiffre d’affaires chaque année.

Aucune réaction de Castel pour l'heure

VOA Afrique a joint par téléphone la direction générale de Castel à Paris, en France, mais aucune personne n'était disponible pour un quelconque commentaire.

"Le quasi-monopole du secteur sucrier dont jouissent les filiales du Groupe Castel depuis vingt ans ne profite pas aux Centrafricains. La population est non seulement contrainte d’acheter le sucre le plus cher d’Afrique centrale, mais l’argent versé pour ce produit de première nécessité a aussi aidé à financer ses bourreaux", se plaint Nathalia Dukhan, investigatrice principale à The Sentry.

Lire aussi : L'ONU enquête sur des tortures par des hommes armés russes

Le rapport intitulé: "Culture de la violence : Le Groupe Castel, géant français du sucre et des boissons, lié au financement de milices armées en République centrafricaine", expose une multitude d’éléments probants qui détaillent la manière dont la SUCAF a conclu un accord tacite de sécurité avec les miliciens de l'UPC.

Selon les termes de l'arrangement, précise The Sentry, les miliciens de l'UPC étaient censés sécuriser l’usine et les champs de canne à sucre de la SUCAF, permettre la libre circulation des transporteurs sur les axes routiers clés et aider à assurer le monopole de la société sur la distribution du sucre dans plusieurs préfectures sous contrôle des rebelles.

En contrepartie, rajoute l'enquête, la SUCAF RCA a versé à l'UPC des paiements directs et indirects en espèces et lui a aussi accordé un soutien en nature sous forme de réparations de véhicules et d’approvisionnement en carburant.

Parmi les les principaux bénéficiaires de cet accord financier figurent le chef de la milice, le général autoproclamé Ali Darassa, ainsi que l’ancien coordinateur politique de l’UPC et actuel ministre de l’Élevage et de la Santé animale Hassan Bouba, précise l'ONG.

Une enquête?

Le rapport recommande aux autorités centrafricaines d'ouvrir une enquête urgente sur les allégations de crimes de guerre et crimes contre l’humanité imputés aux leaders de l'UPC.

The Sentry encourage aussi une coopération avec les autorités compétentes d'autres pays, notamment en occident, pour voir si la SUCAF RCA ou sa maison mère, le Groupe Castel, devraient aussi être traînés devant les tribunaux.