"La corruption se trouve à tous les niveaux au Cameroun dans le secteur des transports", selon Patrice Samen, président du Syndicat national des conducteurs des transports urbain, interurbain et routier du Cameroun.
Syndicaliste depuis une quinzaine d’années, M. Samen se dit indigné de voir la corruption s'étaler au grand jour dans le secteur des transports au Cameroun.
"Les autorités qui délivrent les titres de transports, c’est un banditisme à ciel ouvert. Pour avoir une licence de transport, vous payez et on vous donne un récépissé avec lequel vous allez roulez avec pendant plus d’un an, cet argent est empoché par un individu".
Aux avant-postes, lors de deux importantes grèves des conducteurs de taxi au Cameroun contre les tracasseries policières, Collins Ndefossokeng, président du Syndicat national des employés du secteur des transports terrestres,(synester), dénonce lui aussi les postes de corruption.
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"C’est le contraire qui m’aurait surpris si le ministère des Transports ne figurait pas dans le top 5 des départements ministériels les plus corrompus, parce que la plupart des agences de voyage n’ont pas d’agrément. Comment peuvent-ils avoir pignon sur rue si ce n’est la corruption qui est à l’origine de leur création ?", s’interroge M. Ndefossokeng.
La corruption dans le secteur des transports au Cameroun se manifeste également lors des examens de permis de conduire.
"Ce sont des nids de corruption", affirme le syndicaliste Samen.
Un argument que partage, Hermann qui a passé en 2018 son examen de permis de conduire à Yaoundé.
"Lors de l’examen pratique, on m’avait présenté à un monsieur qui allait me coacher, et à qui il fallait remettre une somme de 10.000 francs. Je l’ai fait. N’ayant pas été admis à l’examen, quelqu’un m’a demandé de lui remettre 30.000 francs CFA, si je veux avoir mon permis de conduire. Jusqu’à ce jour, je n’ai toujours pas mon permis", confie Hermann à VOA Afrique.
Les usagers des administrations des transports se plaignent aussi de la corruption dans de la délivrance des titres de transports, notamment à la délégation départementale des transports à Yaoundé.
"Il y a eu une erreur sur mon prénom au niveau de ma carte grise. Lorsque je m’en vais pour que l’on rectifie cela, la dame qui me reçoit me dit, monsieur ça peut être rectifié, mais il faudra me donner 10.000 francs ou alors vous rentrez avec votre document", témoigne Georges.
Lire aussi : Paul Biya et le Cameroun : un "système" bien huilé pour 35 ans d'histoire communeCe service des transports est connu comme un fief de la gangrène à la Commission nationale anticorruption.
"Vous trouverez des gens qui n’appartiennent pas à cette administration et qui se proposent de vous rendre service. Quand vous adressez directement à l’administration, le service que vous sollicitez, on va vous le rendre un mois après, alors qu’avec ces intermédiaires-là, les mêmes responsables vous rendent le service deux ou trois jours mois après", révèle Alfred Etom, coordonnateur de la stratégie de lutte contre la corruption à la commission nationale anticorruption.
"C’est un phénomène que nous continuons de combattre, nous avons déjà commencé à le faire et je peux vous rassurer que beaucoup croupissent en prison mais vous savez les mauvaises habitudes ont la peau dure", a ajouté M. Etom.
Le ministère des Transports a pris des mesures internes pour freiner l’élan de la corruption "à l’instar de la suppression des paiements en espèces à la caisse de ses services", se défend un cadre de cette administration, qui affirme que le nouveau ministre a pris la pleine mesure de ce problème.
M. Etom de la Conac a d’ailleurs précisé, "qu’en 2017, l’indice de perception de la corruption dans ce département ministériel a connu une légère baisse, passant de 6.84 points en 2010 à 6.34 sur 10".
Un faible recul qui devra accentuer encore le travail de la commission nationale anti-corruption, reconnaît-il néanmoins.