Le bloc des services des consultations externes de l’hôpital central de Yaoundé grouille de monde, comme d’habitude.
Dans cet hôpital, c’était le point névralgique pour les patients qui viennent se faire consulter au quotidien ou répondent à un rendez-vous avec le médecin. Alors que les infirmières sont à l’œuvre pour la prise des paramètres médicaux des patients, certains médecins ne sont pas disponibles pour recevoir les malades.
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Un parent tient sa fillette en main et semble surpris de la nouvelle.
"C’est une dame qui m’a donné cette information au moment où je m’apprêtais à acheter le billet de cession", nous dit-il, l’air désabusé.
L’angoisse monte chez les malades. Les enfants crient ça et là. Hors du bloc des consultations externes, une jeune dame venue de Bertoua attend depuis une heure. Elle déclare avoir effectué plus de six heures de voyage par route pour rallier Yaoundé.
Elle a rendez-vous avec le médecin. "J'ai remis mon carnet au médecin depuis ce matin mais jusqu’ici, il ne m’a pas appelé dans son bureau", confie-t-elle à un membre de sa famille au téléphone.
Pendant trois jours, les services de santé dans les hôpitaux publics seront perturbés. Une expression du malaise d’un corps médical clochardisé au Cameroun.
"Nous avons des carrières qui ne sont pas bien définies. On a des salaires qui oscillent entre 104.000 francs CFA et 204.000 par mois. Parfois, les médecins en zone rurale opèrent les malades dans l’obscurité, sans groupe électrogène. Il est temps que les patients camerounais aient accès aux soins de qualité", explique le docteur Ndoudoumou, secrétaire général du syndicat des médecins du Cameroun.
Le docteur Ndoudoumou a déjà 11 années de service comme médecin et travaille dans la localité d’Akono, à 60 km de Yaoundé.
Dans un hôpital comme celui de la cité verte à Yaoundé, les médecins ont normalement vaqué à leurs occupations.
La directrice de l’hôpital nous autorise un tour des lieux en compagnie du surveillant général de l’hôpital.
"Parmi les malades, il y a les membres de nos familles. Si nous les abandonnons complètement, la situation va s’empirer pour le Cameroun", argumente-t-il .
Toutefois malgré leur présence au service, certains médecins sont plein d’amertume.
"Laissez-moi travailler. Si j’ouvre ma bouche, je vais cracher du feu. Je suis en grève, même présent à mon poste", nous lance une jeune médecin, qui nous éconduit de son bureau.
A cause des mauvaises conditions de vie et de travail, plus de 7.000 médecins camerounais pratiquent à l’étranger.
Seulement 2.500 médecins exercent localement pour une population de plus de 21 millions d’habitants.
Emmanuel Jules Ntap, correspondant à Yaoundé