La Grèce sous pression pour mieux contrôler la frontière de l'UE

Réfugiés en Grèce

La Grèce s'est retrouvée sous la pression de ses partenaires européens pour mieux contrôler sa frontière avec la Turquie, devenue la principale porte d'entrée des migrants dans l'UE, lors d'une réunion à Amsterdam, aussi consacrée à la lutte contre le terrorisme.

C'est la crise migratoire qui a donné lieu aux plus vifs débats, et notamment l'insuffisance de résultats des mesures empilées ces derniers mois pour maîtriser un afflux de migrants qui a remis en question le principe de la libre circulation dans l'espace Schengen.

Les ministres de l'Intérieur des 28, réunis pour la première fois sous l'égide de la présidence néerlandaise de l'UE, ont demandé à la Commission de lancer une procédure qui permettrait d'étendre jusqu'à deux ans les rétablissements de contrôles aux frontières intérieures de Schengen, normalement limités à six mois.

L'Autriche, qui fait partie des pays ayant réintroduit de tels contrôles, a mené la charge contre Athènes, qu'elle avait déjà menacée samedi d'"exclusion provisoire" de Schengen, l'accusant d'être en partie responsable de la situation.

"C'est un mythe que la frontière gréco-turque ne peut pas être protégée, la marine grecque a suffisamment de capacités pour sécuriser cette frontière", a estimé la ministre autrichienne de l'Intérieur, Johanna Mikl-Leitner. Si la Grèce n'agit pas, "la frontière extérieure de l'Europe va se déplacer vers l'Europe centrale".

- Sauvegarder Schengen -

D'autres pays (Allemagne, France, Italie, Espagne) ont également appelé à un renforcement du contrôle des frontières extérieures de l'UE, mais se sont refusés à agiter l'épouvantail d'une exclusion de la Grèce.

Le ministre allemand de l'Intérieur Thomas de Maizière a ainsi appelé Athènes à "faire ses devoirs". Mais "le fait demeure que nous voulons sauvegarder Schengen, nous voulons des solutions européennes communes", a-t-il assuré.

A l'instar d'autres participants, le ministre allemand a insisté sur une mise en oeuvre rapide de l'accord de l'UE avec la Turquie pour freiner les flux de migrants vers l'Europe, qui n'a pas encore produit les résultats escomptés.

La Grèce s'est elle fermement défendue. Selon le droit international, "la seule façon d'agir à une frontière maritime, c'est de faire des opérations de sauvetage", a insisté son ministre chargé de la politique migratoire, Iannis Mouzalas - sauf à "laisser (les migrants) se noyer", a-t-il argué.

Les Etats qui ont reproché à Athènes d'avoir été réticente à solliciter l'aide européenne tardent aujourd'hui à envoyer des gardes-frontières et le matériel qu'ils devaient lui fournir, a contre-attaqué M. Mouzalas. Il a appelé ses homologues à plus de solidarité, notamment dans la mise en oeuvre des plans de répartition des réfugiés dans l'UE, depuis la Grèce et l'Italie ("relocalisations") ou depuis des pays tiers ("réinstallations").

"On n'a jamais discuté ni d'une suspension de Schengen, ni d'une exclusion d'un membre de Schengen", a assuré une porte-parole de la Commission européenne, rappelant que ce scénario était juridiquement impossible.

Les ministres ont en revanche donné "un signal clair à la Commission pour explorer la possibilité pour (l'agence européenne des frontières) Frontex de fournir son assistance à la frontière entre la Macédoine et la Grèce", a précisé Klaas Dijkhoff, le secrétaire d'Etat néerlandais à la Sécurité et à la Justice.

Cette frontière, sous forte pression, a été le théâtre d'une rixe entre migrants lundi, provoquant un mort près du poste frontalier d'Idomeni, passage habituel de la route migratoire vers l'Europe centrale et le Nord.

- Nouveau centre de contre-terrorisme -

La Commission européenne a "été invitée" lundi par les ministres de l'UE à préparer l'activation de l'article 26 du Code Schengen, selon la présidence néerlandaise.

Cette disposition permettrait d'étendre à deux ans les contrôles aux frontières intérieures de Schengen, actuellement réintroduits par l'Allemagne, l'Autriche, la Suède, le Danemark et la France. A défaut, l'Allemagne ne pourrait plus prolonger ces contrôles au-delà de mai.

Pour le ministre français de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, "nous n'aurons pas besoin d'arriver à cette extrémité", si les Européens mettent en oeuvre rapidement des mesures comme le renforcement des contrôles aux frontières extérieures ou sur le nécessaire partage d'informations dans la lutte contre le terrorisme.

Cette mise en commun du renseignement, encore insuffisante de l'avis général, était l'autre grand sujet de la réunion d'Amsterdam, lors de laquelle a été présenté le nouveau Centre européen de contre-terrorisme au sein d'Europol, l'office européen de police, basé à La Haye.

Lors de sa présentation, le directeur d'Europol, Rob Wainwright, a averti que l'organisation Etat islamique (EI) préparait de "nouvelles attaques d'ampleur" dans des Etats membres de l'UE, en particulier en France.

Avec AFP