Moreno-Ocampo va soumettre à la CPI un dossier sur les violences postélectorales au Kenya

Luis Moreno-Ocampo prépare un dossier sur les violences postélectorales au Kenya

Au terme d’une visite au Kenya, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), a annoncé qu'il envisage de présenter d'ici fin 2010 aux juges de la CPI un dossier contre quatre à 6 responsables présumés des violences postélectorales de 2008.

Au terme d’une visite au Kenya, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Luis Moreno-Ocampo, a annoncé qu'il envisage de présenter d'ici fin 2010 aux juges de la CPI un dossier contre quatre à 6 responsables présumés des violences postélectorales de 2008. Sa visite intervient au moment où l’on signale que des groupes ethniques commencent à se réarmer en prévision de la présidentielle de 2012.

Plus de 1.300 personnes avaient été tuées et plus de 300.000 déplacées lors des violences qui avaient suivi l’annonce des résultats contestés du scrutin présidentiel de 2008. Les militants des droits de l’homme craignent maintenant que la prochaine élection de 2012 ne donne lieu à des violences encore plus meurtrières. Ken Wafula, directeur du Centre pour les droits de l’homme et la démocratie, souligne que dans les deux plus grandes communautés kenyanes, les Kikuyus et les Kalenjin, on est en train de reconstituer les stocks d’armes, y compris des fusils d’assaut A-47.

« Les communautés ne veulent pas attendre qu’elles soient de nouveau attaquées. Elles sont en train de s’armer. Elles ont le sentiment que le gouvernement est incapable de les protéger », explique-t-il.

En 2008, les pires violences s’étaient produites dans la fertile vallée du Rift que les Kalenjin considèrent comme leurs terres ancestrales, mais qui sont habitées aussi par une importante communauté Kikuyu. L’annonce de la victoire du candidat sortant, Mwai Kibaki, un Kikuyu, avait mis le feu aux poudres, les Kalenjin soutenant son rival, Raila Odinga.
Ces violences avaient amené la CPI à ouvrir des enquêtes sur les allégations de crimes contre l’humanité commis pendant cette période. M. Moreno-Ocampo a profité de sa visite au Kenya ces derniers jours pour dresser une liste de suspects et tout porte à croire que des ministres, des politiciens et des hommes d’affaires importants figurent sur cette liste.

L’année dernière, M. Wafula avait été arrêté pour incitation à la violence pour avoir signalé que les groupes ethniques étaient en train de se réarmer. Aujourd’hui, il se dit décidé à parler haut et fort car, selon lui, la situation se détériore rapidement en dépit des assurances du président Kibaki et du premier ministre Odinga, ces derniers disant qu’ils vont débarrasser le pays des armes illégales.

Au cours des derniers mois, les forces de sécurité ont été envoyées dans la vallée du Rift et dans d’autres parties du pays pour faire la collecte des armes illégales qui proviennent du Soudan, de la Somalie et de l’Ouganda. M. Wafula pense qu’une partie de ces armes est redistribuée à des communautés ethniques par certains hauts responsables.
« Le désarmement cache en fait le vrai trafic d’armes qui se fait dans plusieurs communautés. De hauts responsables sont impliqués dans ce trafic » affirme-t-il.

Au Kenya, les politiciens ont toujours profité des campagnes électorales pour consolider leur assise tribale et même réveiller l’animosité ethnique pour prendre le dessus sur leurs adversaires. Depuis l’instauration du multipartisme en 1992, aucune des élections n’a échappé à la violence électorale.