Il fait parti des 670.000 personnes qui ont tout abandonné pour fuir la sanglante insurrection qui déchire la province stratégique du Cabo Delgado, riche en gaz naturel.
"Je préfèrerais mourir plutôt que continuer à subir la souffrance que je vis ici", dit pourtant sans trembler l'homme de 61 ans, qui a vu sa femme être emportée par les rebelles.
Brûlant les villages, exécutant les hommes et emportant les jeunes filles, des groupes armés qui ont prêté allégeance à l'Etat islamique sèment la terreur depuis plus de trois ans dans le nord du pays.
Lire aussi : Mozambique: Une épidémie de choléra fait 55 morts parmi les déplacés"Ils peuvent recouvrir la maison de zinc ou m'offrir un avion, je veux rentrer chez moi", répète Idrisse Cachimo, repensant aux deux maisons qu'il avait là-bas, sa ferme, ses chèvres.
Depuis son abri fait de tiges de bambou et de boue, il voit chaque jour des voitures partir en direction de son ancien village de Macomia, tristement célèbre pour être la cible de violentes attaques.
Là, deux ans plus tôt, des insurgés ont coupé la tête d'un homme, avant de la brûler et de la laisser exposée sur le marché. La première d'une longue série de décapitations.
"Ca ne suffit pas"
De plus en plus, dans le camp de déplacés, court la rumeur que certains sont retournés chez eux. Mais la région est toujours occupée par les insurgés.
Après avoir atteint un pic en fin d'année dernière, les attaques ont récemment diminué. Le conflit n'est toutefois pas terminé, a mis en garde le gouvernement.
Une vingtaine de nouveaux camps pour les déplacés ont été aménagés dans des villages, loin des violences. Mais c'est insuffisant, seulement 50.000 personnes y ont trouvé une place, dans des conditions souvent difficiles.
Dans le camp de Ntocota, à 45 km de Pemba, la capitale du Cabo Delgado, les familles sont rationnées à 40 litres d'eau par jour. "Ca ne suffit pas", se lamente le chef du village Ntaguiha Camale.
Environ 1.060 déplacés sont là. Pas d'école, pas de toilettes, les occupants font leurs besoins dehors.
L'hôpital le plus proche se trouve à une heure de route. Les malades sont transportés sur des moto qui font office d'ambulances.
"Quand quelqu'un tombe malade, le village se cotise pour acheter quatre litres d'essence" pour le trajet, explique le chef du village.
"Rien à faire ici"
Les autorités du Cabo Delgado affirment ne pas avoir l'argent pour aider les déplacés et ne compter que sur le soutien des ONG.
"Idéalement, il faudrait 80 camps pour ces gens. Beaucoup sont encore hébergés dans des familles d'accueil", explique à l'AFP le secrétaire d'État de la province de Cabo Delgado, Armindo Ngunga.
Selon l'Unicef, 90% des déplacés, répartis sur trois provinces, ont été hébergés dans des familles. En sécurité, ils sont toutefois confrontés à une certaine animosité de la part des locaux.
Anifa Amimo, 35 ans, a bien tenté de cultiver les terres autour de sa nouvelle maison, pour nourrir ses neuf enfants. Mais "les locaux nous harcèlent et ne nous laissent pas travailler dans les champs. Ils disent que cette terre est à eux", dit-elle en épluchant du manioc.
"Il n'y a rien à faire ici", explique simplement Simba Jamal, ancien paysan de 55 ans, que l'ennui tue à petit feu.
Le conflit dans le nord du Mozambique a fait 2.500 morts, dont plus de la moitié de civils d'après l'ONG Acled.
Selon les Nations Unis, près d'un million de personnes souffrent d'insécurité alimentaire dans la région. Et au moins 4.900 personnes ont été contaminées par le choléra depuis la fin de l'année, dont 55 qui en sont décédées.