100.000 emplois par an pour résorber le problème du chômage, telle était la promesse faite par Patrice Talon. Mais deux ans après son élection à la tête du Bénin, le gouvernement Talon n'aura réussi à créer que 63.284 emplois et a supprimé des milliers d'autres par le biais des réformes institutionnelles et politiques très controversées.
Les chiffres ont été publiés par la plateforme des organisations de la société civile dans un rapport sur la gestion Talon le 6 avril 2018.
"Que le gouvernement actuel ait vraiment un regard sur l'emploi des jeunes afin que ceux qui ont un diplôme puissent trouver à faire... Les jeunes continuent toujours d'attendre... Ce que je leur conseille, c'est l'entrepreneuriat et rien que l'entrepreneuriat. C'est une mauvaise politique que d'investir les jeunes en stage et de les laisser deux ans à la maison", explique Olivier Hounnou, un Beninois diplômé sans emploi.
Le chômage est à un taux très élevé actuellement, 14,3% selon l'institut national de la statistique et de l'analyse économique. Le taux de sous-emploi est quant à lui de 50%. Pour certains, le nouveau départ prôné par le Président est une utopie.
"Le président Talon avait dit: 'je suis prêt tout de suite et maintenant'. Mais dans ses actions on constate qu'il n'était pas prêt du tout... Côté sécurité, c'est bon. Côté énergie c'est bon. Le reste, c'est zéro. Le chef de l'état a fait des déguerpissements et ce n'est pas bon", souligne Alain Singbo, un autre diplômé au chômage.
Pour d'autres, ce n'est pas encore le pays d'abondance, mais le chef de l'état mérite qu'on reconnaisse ses efforts.
"Qui dit que le chef de l'état ne travaille pas? Le chef de l'état travaille. Sur papier, on le félicite, mais les réalités du terrain sont là malheureusement", selon Vincent Adonon, commerçant.
En deux ans de gestion de Patrice Talon, la vie est de plus en plus chère. Les produits de première nécessité ont connu une nette augmentation.
Le pain est toujours à 125 francs CFA la baguette, le gari, fabrication locale, a connu une hausse de 100 francs CFA. Le taux de misère et de pauvreté selon l'INSAE est passé de 35,1% en 2014 à 41,7% en 2018.
Pour l'économiste Edouard Sonou, "la pauvreté est ambiante et la misère est devenue la chose la mieux partagée au Bénin".
"Nous avons une économie essentiellement fiscale. Ça ne suffit pas. On passe tout le temps à motiver les paysans à aller cultiver le coton qu'on ne mange pas, qu'on ne délaye pas, mais qu'on exporte intégralement", déplore-t-il.
De surcroît, une crise sociale s'est installée et semble résister à tous les appels à la négociation.
Pour Patrice Talon, la situation actuelle que traverse le Bénin avec la paralysie de l'administration publique est un chemin essentiel pour atteindre de meilleurs horizons.
"Il y a une fronde sociale c'est vrai. Mais à vouloir préserver la paix, la quiétude, la tranquillité telle que nous l'entrevoyons au sacrifice de l'effort, au sacrifice des réformes, au sacrifice des exigences pour une renaissance de notre pays, nous allons compromettre la paix pour les temps à venir", a déclaré le président.
Une des promesses restées vaines: la question énergétique. Pendant deux ans, les projets se sont succédés sans résoudre le problème des délestages dont les multiplications ces derniers mois constituent un casse-tête pour les chefs d'entreprise et les ménages.
Au total, 198 promesses auraient été faites par le candidat Patrice Talon pendant les campagnes électorales selon la plateforme des organisations de la société civile à Cotonou. En deux ans, la plateforme recense seulement 33 promesses tenues dont la lutte contre la corruption.
Pour Martin Assogba et Jean Baptiste Elias, tous deux membres de la société civile et ardents défenseurs de la lutte contre la corruption, Patrice Talon mérite des encouragements pour sa lutte contre l’impunité.
"Lutte sélective ou non il faut que nous commencions la lutte contre la corruption quelque part. La lutte contre l'impunité avec le président Talon est beaucoup plus marquée. Que l'on veuille l'apprécier comme étant dans un camp contre un autre, nous qui travaillons dans le domaine, nous estimons qu'il faut commencer par un bout".
Ginette Fleure Adandé, correspondante à Cotonou