Pénurie de fonds pour la santé au Soudan, un million de personnes menacées

Des réfugiés fuient la violence au Soudan du Sud, traversent la frontière en Ouganda où ils attendent un moyen de transport pour la ville Koboko (en Ouganda), 6 janvier 2014.

Des dizaines de centres médicaux soutenus par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) dans des zones de conflit au Soudan risquent de fermer faute de financement, mettant près d'un million de personnes à la merci de probables épidémies.

Onze cliniques ont déjà arrêté de fonctionner au Darfour et dans les Etats du Nil Bleu et du Kordofan-Sud, où des années de conflit entre les forces gouvernementales et des rebelles ont chassé de chez eux des dizaines de milliers de personnes.

Alors que le monde a les yeux braqués sur d'autres conflits, notamment en Syrie, et qu'une crise de financement se fait plus aiguë, 49 autres centres médicaux dans ces régions risquent de disparaître, selon la représentante de l'OMS au Soudan.

"Nous n'avons pas suffisamment de fonds pour continuer à soutenir des cliniques dans des zones reculées", affirme ainsi à l'AFP Naeema al-Gasseer. "Environ un million de personnes pourraient en être affectées".

Quelque 323.000 femmes en âge de procréer et enfants de moins de cinq ans n'auront plus accès à des soins médicaux, d'après elle.

"Une augmentation des risques d'épidémies est probable", met en garde Mme Gasseer.

L'OMS a besoin de quelque sept millions de dollars (6,7 millions d'euros) pour faire fonctionner l'année prochaine les cliniques qu'elle soutient, dont plus de la moitié se trouvent au Darfour.

Cette région occidentale de la taille de la France est le théâtre d'un conflit sanglant depuis 2003 quand des insurgés issus de minorités ethniques ont pris les armes contre le pouvoir de Khartoum, aux mains de la majorité arabe.

L'ONU estime que les combats y ont fait au moins 300.000 morts et 2,5 millions de déplacés.

Les Etats du Nil Bleu et du Kordofan-Sud ont connu des affrontements similaires.

'Urgence oubliée'

"Le Soudan ressemble à une urgence oubliée", affirme Adil al-Mahi de Save the Children Suède, qui gère des centres de soins pour enfants dans des zones en conflit. "Nous n'avons pas d'argent (...) pour entretenir les équipements ou nous occuper des enfants souffrant de malnutrition".

Cette ONG doit interrompre son soutien à 20 centres de santé au Kordofan-Sud, affectant quelque 200.000 personnes.

L'ONU insiste toutefois pour dire que le Soudan reste une priorité pour les donateurs internationaux.

En juillet, les Nations unies ont lancé un appel visant à récolter près d'un milliard de dollars pour financer l'aide humanitaire au Soudan et ont réussi à en réunir 550 millions (526 M EUR).

Un montant jugé important par des responsables onusiens au vu de la situation d'urgence en Syrie, en Irak, au Yémen et en Afghanistan.

"Les donateurs internationaux ont accordé plus de 3,2 milliards de dollars (3 milliards d'euros) aux actions humanitaires au Soudan" ces cinq dernières années, affirme Samantha Newport, porte-parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU.

Mais l'aide apportée au secteur de la santé reste faible.

L'ONU avait estimé à 66 millions de dollars (63 M EUR) le besoin de financement pour ce secteur en 2016 mais n'a reçu que 28 millions de dollars (26,7 M EUR).

L'essentiel des fonds réunis pour le Soudan cette année a servi à nourrir les communautés les plus vulnérables. "Plus de 330 millions de dollars (316 millions d'euros) ont été utilisés pour nourrir 4,6 millions de personnes", indique Mme Newport.

Même si l'économie du pays reste exsangue après des décennies de sanctions commerciales imposées par Washington, les Nations unies cherchent maintenant à trouver des financements au Soudan pour compenser la baisse des dons internationaux.

"Nous devons trouver de nouvelles alternatives, trouver des ressources à l'intérieur du Soudan", plaide Abdullah Fadil, qui dirige le Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef) au Soudan et dit ne plus pouvoir compter sur les donateurs étrangers.

Avec AFP