Pompeo s'adresse à la diaspora iranienne pour "soutenir" les manifestants anti-régime

Le président américain Donald Trump, à droite, écoute le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo lors d'une conférence de presse après un sommet des chefs d'Etat et de gouvernement au siège de l'OTAN à Bruxelles, en Belgique, le 12 juillet 2018.

Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo s'adresse dimanche à la diaspora iranienne aux Etats-Unis pour "soutenir" les manifestations en Iran, flirtant toujours avec l'espoir d'un changement de régime après avoir claqué la porte de l'accord sur le nucléaire iranien.

Le 8 mai, le président Donald Trump, dont la République islamique est devenue la principale bête noire depuis son propre rapprochement inattendu avec la Corée du Nord, décidait de rétablir toutes les sanctions levées dans le cadre de cet accord censé empêcher Téhéran de se doter de la bombe atomique.

A la suite de ce retrait qui a choqué les plus proches alliés européens de Washington, Mike Pompeo dévoilait le 21 mai sa "nouvelle stratégie" visant à contraindre l'Iran à se plier à douze exigences draconiennes, sous la pression des sanctions "les plus fortes de l'Histoire".

Troisième acte ce dimanche à 18 heures (lundi 1 heures GMT), à la bibliothèque présidentielle Ronald Reagan à Simi Valley, en Californie, où le secrétaire d'Etat américain prononce un discours intitulé "Soutenir les voix iraniennes".

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"A l'approche du 40e anniversaire de la révolution islamique" de 1979, Mike Pompeo va retracer "les 40 dernières années de vol au détriment du peuple iranien, de terrorisme commis dans la région, de répression brutale en Iran" et de "persécution religieuse", a expliqué à la presse un haut responsable du département d'Etat, rappelant qu'environ 250.000 Irano-Américains vivent dans le sud de la Californie.

"Il va mettre en lumière la corruption" de ce "régime kleptocratique" qui "a donné la priorité à son idéologie par rapport au bien-être du peuple iranien", a précisé ce diplomate.

"Coup d'Etat militaire"

Le ministre avait déjà lancé en juin sa propre campagne anti-Iran sur Twitter, visant notamment les Gardiens de la révolution, l'armée d'élite du régime, accusés de s'enrichir pendant que "les familles se débattent".

L'idée de l'administration Trump est simple: tenter de profiter des tensions sociales qui semblent se multiplier en Iran, sur fond de difficultés économiques aggravées par l'annonce du retour des sanctions américaines qui fait partir de nombreuses entreprises étrangères.

Des manifestations contre le pouvoir, pour des motifs variés, se sont enchaînées ces derniers mois dans le pays. Mike Pompeo entend "soutenir les demandes légitimes du peuple iranien, notamment leur aspiration à une vie meilleure".

Jusqu'où va-t-il aller?

"C'est la question-clé", estime Behnam Ben Taleblu, du groupe de pression conservateur Foundation for Defense of Democracies (FDD). "Pompeo et l'administration peuvent faire davantage" qu'un soutien strictement rhétorique, notamment "en termes de sanctions", dit-il à l'AFP.

Plusieurs dissidents iraniens ont ainsi écrit au secrétaire d'Etat pour lui demander de rétablir des mesures punitives contre l'Islamic Republic of Iran Broadcasting, c'est-à-dire la radio-télévision publique du pays, accusée de "jouer un rôle central dans les violations des droits de l'Homme".

L'approche du discours de Mike Pompeo a relancé les spéculations sur les intentions de Washington.

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Le département d'Etat assure vouloir uniquement "un changement du comportement du régime". Mais certains membres de l'administration, comme le conseiller à la sécurité nationale John Bolton, n'ont pas caché par le passé leur souhait de voir tomber le régime de Téhéran, et le chef de la diplomatie a appelé en mai le peuple iranien à "faire un choix sur ses dirigeants".

"Un vrai changement de régime ne peut venir que de l'intérieur", explique Behnam Ben Taleblu. Selon lui, "des Iraniens de toutes classes sociales manifestent plus que jamais" et il revient à l'administration Trump de décider si elle souhaite, ou non, "soutenir les éléments qui veulent un changement de régime".

La communauté diplomatique et les experts sont divisés à Washington quant à savoir si la République islamique est vraiment ébranlée par la crise sociale en cours, voire menacée de l'intérieur. Et le débat fait rage aussi sur les conséquences d'une éventuelle chute du pouvoir actuel.

"Le résultat le plus probable d'un éventuel effondrement du régime serait un coup d'Etat militaire pour rétablir l'ordre, mené par l'homme que les faucons de Washington redoutent le plus: le général Ghassem Souleimani", qui commande les opérations extérieures des Gardiens de la révolution, met en garde Mark Fitzpatrick, de l'International Institute for Strategic Studies. "Exercer une pression maximale sur l'Iran pourrait aboutir au pire cauchemar pour l'Amérique."

Avec AFP