RDC

L'armée congolaise engage ses avions de chasse face à l'avancée du M23

ARCHIVES - des combattants du groupe rebelle M23 à Sake, une localité située à 30 km de Goma, le 30 novembre 2012.

L'armée congolaise a engagé jeudi deux avions Sukhoï 25 contre les rebelles du M23, qui se sont emparés ces derniers jours de nouveaux villages d'un territoire de l'est de la République démocratique du Congo.

"Deux avions de chasse ont bombardé et des chars ont pilonné les positions du M23 à midi", a déclaré par téléphone un habitant de Kibumba, localité située à une vingtaine de km au nord de la capitale provinciale Goma. "Nous avons espoir, nous avançons", ajoutait une source sécuritaire. L'armée avait mené de première frappes le 8 novembre avec deux Su-25, qu'elle n'avait pas réengagés depuis.

Selon des sources administratives et des habitants interrogés plus tôt dans la journée, le M23 restait à l'offensive dans ce secteur de Kibumba, mais il a aussi progressé vers l'ouest du territoire de Rutshuru, dont il contrôle le quart sud-est, frontalier de l'Ouganda et du Rwanda.

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"Ici chez nous, c'est le M23. Ils sont à Tongo, Murimbi, Rutshovu, Rushenge...", a déclaré un habitant de Tongo, localité en bordure du parc des Virunga, sur une route menant vers le territoire voisin du Masisi. "Les rebelles sont ici, ils ont même fait un meeting...", confirmait un autre.

Le M23 (Mouvement du 23 mars), une ancienne rébellion tutsi qui a repris les armes en fin d'année dernière, s'est emparé en juin de Bunagana, à la frontière avec l'Ouganda et, après plusieurs semaines d'accalmie, est reparti le 20 octobre à l'offensive. Sa résurgence a ravivé les tensions entre la RDC et le Rwanda.

Kinshasa accuse Kigali d'apporter au M23 un soutien que des experts de l'ONU et des responsables américains ont également pointé ces derniers mois. Kigali conteste, en accusant en retour Kinshasa, qui nie également, de collusion avec les FDLR, des rebelles hutu rwandais implantés en RDC depuis le génocide des Tutsi en 1994 au Rwanda.

Des manifestations hostiles au Rwanda sont fréquemment organisées en RDC. De nouvelles marches ont eu lieu jeudi, notamment à Lubumbashi, la grande ville minière du sud-est, où des débordements ont été enregistrés. Des manifestants ont caillassé des véhicules et s'en sont pris à des passants. Au moins une femme, supposée ressembler à une Rwandaise, a été molestée.

En un peu moins d'un mois, le M23 a pris le contrôle de plusieurs localités sur la RN2, qui mène à Goma, traversé la route vers l'ouest et continué de descendre vers le sud, vers la capitale provinciale.

Les rebelles ont affirmé mercredi avoir pris Kibumba, ce que des sources sécuritaires confirmaient jeudi matin sous couvert d'anonymat. Kibumba et Buhumba, localité toute proche, "sont contrôlées par l'ennemi. Nous sommes à Kibati", à environ 4 km au sud, indiquait une de ces sources avant l'entrée en action des avions de chasse.

"Fuite devant l'ennemi"

Les affrontements de Kibumba avaient provoqué mardi la fuite vers Goma de milliers de déplacés paniqués qui, sur fond de rumeur d'avancée rebelle, avaient vu des militaires à moto s'enfuir eux-mêmes.

Trois soldats ont été jugés dès le lendemain par le tribunal militaire de la garnison de Goma qui les a condamnés à mort pour "lâcheté, violation des consignes" et pour avoir "fui devant l'ennemi", a indiqué jeudi le tribunal à l'AFP. La peine de mort est souvent prononcée en RDC dans des affaires de sécurité nationale, mais n'est plus appliquée depuis près de vingt ans.

De nombreux déplacés qui s'étaient enfuis étaient revenus jeudi au camp de Kanyarichinya, au nord de Goma. Parmi eux, Eugène est assis, désemparé. "Je n'ai nulle part où dormir", dit-il à l'AFP, en craignant de voir arriver les rebelles. Yaidi lui, père de famille, est en train de construire un abri de fortune pour ses enfants. "J'ai préféré qu'ils soient juste à côté de moi, pour qu'en cas d'attaque nous puissions tous fuir ensemble", déclare-t-il.

De son côté le commandant de la Force régionale de la Communauté des Etats d'Afrique de l'est (FRCAE), le général kényan Jeff Nyagah, arrivé mercredi à Goma, "s'est rendu sur les lignes de front", a indiqué dans un communiqué cette force en cours de déploiement. Selon le texte, "sa visite a permis de remonter le moral des troupes". Il leur a notamment fait savoir que la FRCAE se préparait à protéger en cas de besoin "l'aéroport international et ses environs" ainsi que "les principaux bâtiments" de Goma.