Le Japon et la Corée appellent à sanctionner Pyongyang face à un Poutine inflexible

Le Premier ministre japonais Shinzo Abe et le président sud-coréen Moon Jae-in.

Le Premier ministre japonais Shinzo Abe et le président sud-coréen Moon Jae-in ont plaidé jeudi pour de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord auprès de Vladimir Poutine, inflexible dans son appel à privilégier le dialogue.

En première ligne, Tokyo et Seoul appellent à une réponse sévère depuis que Pyongyang a revendiqué dimanche l'essai d'une bombe H, d'une puissance sans précédent. Leur allié américain a présenté mercredi un projet de résolution au Conseil de sécurité de l'ONU imposant un embargo pétrolier et le gel des avoirs de Kim Jong-Un.


La Russie insiste elle sur la nécessité d'un dialogue avec la Corée du Nord, tout comme la Chine, principal allié de Pyongyang, qui a cependant dit jeudi son accord à des "mesures nécessaires" des Nations Unies.

Aux côtés de Vladimir Poutine et du président sud-coréen sur la scène d'un forum économique à Vladivostok, dans l'Extrême orient russe, Shinzo Abe a appelé à "exercer la plus grande pression possible sur la Corée du Nord" pour forcer le régime de Kim Jong-Un à "abandonner ses programmes nucléaire et de missiles de manière complète, vérifiable et irréversible".

Le président sud-coréen Moon Jae-in, qui avait déjà demandé après l'essai d'infliger "la punition la plus forte" à Pyongyang, a estimé que "le temps est peut-être venu pour des sanctions plus sévères", précisant espérer que cette mesure sera soutenue par la Russie.

Mais Vladimir Poutine, qui a jugé mardi des sanctions "inefficaces" car les Nord-Coréens selon lui "mangeront de l'herbe mais ne renonceront pas au programme" nucléaire, a répété jeudi qu'il jugeait "impossible d'intimider" la Corée du Nord et a dit espérer un retour "au bon sens" pour éviter "un conflit à grande échelle".

Après trois heures d'entretien avec Shinzo Abe, il "répété la position (russe): le règlement de la situation (...) n'est possible que par des moyens diplomatiques", sans se prononcer explicitement sur le texte présenté mercredi à l'ONU.

Plus tard dans la journée, son porte-parole Dmitri Peskov a jugé "prématuré de donner de quelconques conclusions" concernant le projet américain, appelant à "attendre le bilan de la réflexion" en cours.

Selon le Japon, l'essai nord-coréen a dégagé une puissance de 160 kilotonnes, soit plus de dix fois celle de la bombe américaine lancée sur Hiroshima en 1945, sur la base d'informations d'un organisme international.

Loin de reculer face au tollé provoqué dans le monde entier, Pyongyang a organisé mercredi des cérémonies massives en hommage aux scientifiques qui ont réalisé ce test, avec feux d'artifice et rassemblement massif.

- 'Mesures nécessaires' -

Alimentant les craintes de surenchère, Séoul et Washington ont achevé jeudi en Corée du Sud le déploiement du bouclier antimissile américain Thaad visant à contrer la menace nord-coréenne, en dépit de violentes manifestations et de protestations diplomatiques "vigoureuses" de Pékin.

Pour autant, Donald Trump, partisan d'une ligne dure, semble mettre en sourdine ses déclarations martiales des derniers jours en assurant mercredi qu'une action militaire ne constituait pas son "premier choix".

A l'ONU, les Etats-Unis, soutenus par le Royaume-Uni et la France, veulent passer au vote dès lundi mais l'attitude de la Chine et de la Russie, qui ont adopté les dernières sanctions mais peuvent bloquer ce texte grâce à leur droit de veto, reste incertaine.

Le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi a semblé effectuer une ouverture en disant approuver le principe de "mesures nécessaires". Il a cependant prévenu que "les sanctions et les pressions" sur le régime de Kim Jong-Un ne pouvaient constituer que "la moitié de la clef pour résoudre" cette crise.

A Tallinn, la chef de la diplomatie de l'UE, Federica Mogherini, a annoncé que l'Union européenne préparait ses propres sanctions complétant celles envisagées à l'ONU.

Moscou et Pékin plaident pour un double moratoire des essais balistiques et nucléaires nord-coréens mais aussi des manoeuvres militaires conjointes entre Américains et Sud-Coréens.

Ni Washington ni Tokyo n'y sont favorables. "Les deux choses qu'on met sur la balance ne sont pas équivalentes", a déclaré jeudi à l'AFP le porte-parole de la diplomatie japonaise, Norio Maruyama.

Ces exercices militaires sont "une dissuasion nécessaire" face au régime de Pyongyang, a-t-il assuré, en estimant que "le temps n'est pas pour le dialogue".

Avec AFP