Une grande partie de la production minière échappe au trésor public dans le Nord Kivu

Des creuseurs artisanaux dans une mine d'or au Nord-Kivu, RDC, 21 avril 2015. (VOA/Charly Kasereka)

Les autorités de la province et la société civile se sont engagées à lutter contre la fraude dans le secteur minier dans le Nord-Kivu, dans l’est de la RDC. Elles ont lancé une campagne contre cette fraude le mois dernier, révélant que 60 % de la production minière échappe au trésor la province.

En 2017, le Nord-Kivu a produit plus de 26 millions de dollars dans le secteur minier. Il y en aurait eu plus s’il n’y avait pas de fraude entretenue par des civils, des militaires et des groupes armés.

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Un transporteur de minerais à Butembo, dans le Nord-Kivu, RDC, 20 avril 2015. (VOA/Charly Kasereka)

Le gouvernement provincial promet de frapper fort et la société civile réclame un procès public et exemplaire pour tous les présumés fraudeurs déjà arrêtés.

La province du Nord-Kivu produit environ un million de tonnes de minerais chaque année, notamment le coltan et la cassitérite. Mais les recettes sont minces à cause de la fraude.

Le mois dernier, six véhicules d'ONG ou de particuliers ont été interceptés par les services de sécurité en provenance de Masisi, une zone minière située à 80 kilomètres à l’ouest de la ville de Goma.

Des creuseurs artisanaux dans une mine d'or au Nord-Kivu en RDC, 21 avril 2015. (VOA/Charly Kasereka)

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Pour le ministre provincial des mines, c’est une perte énorme pour la province.

Des creuseurs artisanaux dans une mine d'or au Nord-Kivu en RDC, 21 avril 2015. (VOA/Charly Kasereka)

"Nous avons attrapé plusieurs personnes en 2017, mais il y a des cas qui dépassent les entendements. Par exemple, cette camionnette interceptée à la frontière entre le Nord Kivu et le Rwanda, qui transporterait plus de 5 tonnes de nos minerais vers le Rwanda. C’est une perte énorme pour notre pays et notre province ", explique Anselme Kitakya, ministres des mines.

Les présumés fraudeurs recourent à différentes stratégies pour faire sortir les minerais des zones d'extraction de Goma. Des femmes faufilent des colis dans leurs vêtements, des motos cyclistes versent des matières brutes dans les réservoirs de leurs motocyclettes, d’autres dans des bidons remplis de lait.

Deux jeunes hommes d'une vingtaine d'années viennent d’être attrapés à la barrière entre Masisi et Goma.

Depuis des années, des véhicules sont interceptés à la frontière entre la RDC et le Rwanda.

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Dernière affaire en date : le 13 décembre dernier, à bord d’une camionnette, plus de 300 kilos de coltan brut ont été saisis.

La Commission nationale de lutte contre la fraude minière promet de redoubler de vigilance malgré les difficultés auxquelles cette région trouble du Kivu est confrontée, promet Daniel Mbayo, son coordonnateur provincial. Il appelle les autorités politiques à soutenir cette lutte.

La société civile, elle, demande un procès exemplaire contre les présumés fraudeurs arrêtés.

Une mine d'or au Nord-Kivu en RDC, 21 avril 2015. (VOA/Charly Kasereka)

"Nous demandons aux autorités de la RDC de faire un procès exemplaire et rappelons à la communauté internationale qu’il y a crime économique ici et que toutes les personnes impliquées doivent répondre de leurs actes", déclare à VOA Afrique Etienne Kambale, rapporteur de la société civile.

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Le gouverneur joue à l'apaisement pour tous ceux qui réclament un procès. Le numéro un de la province condamne aussi les pays voisins qui seraient impliqués de près ou de loin dans cette fraude de minerais depuis de décennies en finançant les multiples groupes armés au Nord-Kivu.

Il y a peu de comptoirs d’achat de minerais opérationnels à Goma et la frontière sur le lac Kivu n’est pas bien surveillée par manque des moyens suffisant pour la force navale congolaise.