Le régime syrien poursuit ses raids meurtriers sur un fief rebelle près de Damas

La défense civile syrienne aide une femme dans la ville assiégée de Douma, dans l'est de la Ghouta, à Damas, en Syrie, le 22 février 2018.

Faisant fi des appels internationaux à stopper le bain de sang, le régime syrien a repris ses frappes aériennes sur la Ghouta orientale, fief rebelle où cinq jours de pilonnage dévastateur ont tué plus de 400 civils, dont 95 enfants.

Le patron de l'ONU Antonio Guterres a demandé une trêve immédiate et dénoncé un "enfer sur Terre" dans cette région aux portes de Damas. L'Allemagne a appelé à faire cesser le "massacre". Les ONG se sont dites horrifiées par l'ampleur des bombardements, d'une violence inédite depuis le début de la guerre en 2011.

Et le Conseil de sécurité devrait voter, probablement jeudi, sur un projet de résolution réclamant un cessez-le-feu de 30 jours pour permettre l'accès à la Ghouta orientale, région assiégée depuis 2013 par le régime.

Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a assuré que son pays, grand allié de Damas, était prêt à examiner ce texte, sous certaines conditions.

Il a précisé que Moscou avait proposé "il y a quelques jours" aux combattants de la Ghouta orientale d'évacuer le secteur mais que des jihadistes et leurs alliés avaient "catégoriquement rejeté cette proposition".

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Pour le cinquième jour consécutif, les forces du président syrien Bachar al-Assad soumettaient jeudi cette région à un déluge de feu, prélude à une offensive terrestre pour la reprendre.

Le coût humain est énorme. Les destructions sont colossales.

Au moins 46 civils, dont sept enfants, sont morts jeudi dans des frappes aériennes et un déluge de roquettes visant plusieurs localités, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Selon l'OSDH, 17 civils avaient été tués dimanche, 127 lundi, 128 mardi et 85 mercredi.

Sur la route menant à un hôpital de Douma, grande ville de la Ghouta orientale, des mares de sang sont visibles partout, selon un correspondant de l'AFP. A l'hôpital, des corps enveloppés de linceuls blancs, dont ceux de deux enfants, gisent au sol.

Dans la localité de Hammouriyé, des habitants se pressent devant un magasin pour acheter de la nourriture, avant de prendre la fuite. Des obus ont explosé à proximité.

- 'Campagne d'annihilation' -

Le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, a appelé la communauté internationale à "mettre un terme à cette monstrueuse campagne d'annihilation".

Car l'opération militaire du régime lancée dimanche a fait au moins 382 morts parmi les civils, dont plus de 90 enfants, et plus de 1.900 blessés, selon un nouveau bilan de l'Observatoire.

Pendant la même période, 15 personnes ont été tuées par la chute à Damas, bastion du régime, d'obus et de roquettes tirés par des rebelles islamistes ou des jihadistes depuis la Ghouta, selon les médias d'Etat et l'OSDH.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a réclamé un accès à la Ghouta orientale pour porter secours aux blessés, qui meurent selon lui faute de soins immédiats et de matériel médical.

Ces trois derniers jours seulement, 13 hôpitaux où intervient l'ONG Médecins sans frontières ont été bombardés dans la Ghouta orientale, selon l'organisation.

"Le régime prétend viser des groupes armés mais en vérité il ne vise que les civils!", s'est insurgé Ahmed Abdelghani,médecin dans les hôpitaux bombardés de Hammouriyé et Arbine. "C'est un hôpital civil, pourquoi le régime nous vise-t-il ?"

L'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, mais aussi le Qatar, ont appelé jeudi à mettre fin à l'escalade de la violence dans la Ghouta orientale, où quelque 400.000 habitants subissent au quotidien un siège asphyxiant.

- Moscou défend Damas -

Le régime cherche à reprendre la Ghouta orientale, pour, dit-il, stopper les tirs de roquettes sur Damas. Selon le quotidien syrien Al-Watan, l'offensive terrestre "d'envergure peut commencer à tout moment".

Depuis le début en 2011 de la guerre en Syrie, plusieurs zones rebelles, comme la vieille ville de Homs en 2012 ou Alep en 2016, ont été écrasées par des bombardements et un siège étouffant, pour forcer les combattants antirégime à déposer les armes.

Le conflit en Syrie, qui a fait plus de 340.000 morts, a d'abord opposé les rebelles au régime puis s'est complexifié avec l'implication de groupes jihadistes et de puissances étrangères.

Avec l'intervention de la Russie en 2015, le régime Assad, qui était en mauvaise posture, a réussi à reprendre le contrôle de plus de la moitié du territoire.

Moscou a de nouveau défendu son allié jeudi. "Ceux qui sont responsables de la situation dans la Ghouta orientale sont ceux qui soutiennent les terroristes qui s'y trouvent encore. Et comme vous le savez, ni la Russie, ni la Syrie, ni l'Iran ne font partie de cette catégorie de pays", a dit le Kremlin.

Avec AFP