"Labyrinthe mortel" pour les civils de Raqa , selon Amnesty

Une enfant de Raqa dans un camp temporaire de personnes déplacées,Tabqa, 55 kilometres à l'ouest de Raqa.

Les civils bloqués dans la ville syrienne de Raqa, fief du groupe Etat Islamique (EI), sont pris au piège dans un "labyrinthe mortel" en raison des combats intenses visant à chasser les djihadistes, assure jeudi Amnesty International.

L'ONU estime jusqu'à 25.000 le nombre de civils présents dans la ville, alors que des dizaines de milliers d'autres ont fui, bravant les tireurs embusqués de l'EI et les mines.

"Alors que la bataille pour arracher Raqa à l'EI s'intensifie, des milliers de civils à l'intérieur sont pris au piège dans un labyrinthe mortel où ils sont sous le feu de toutes parts", assure une conseillère pour les situations de crise à Amnesty, Donatella Rovera.

Depuis leur entrée en juin dans la "capitale" de l'EI en Syrie, les Forces démocratiques syriennes (FDS) --alliance arabo-kurde soutenue par les Etats-Unis-- ont chassé l'organisation djihadiste la plus redoutée au monde de 60% de la cité qu'elle contrôle depuis 2014.

"Les FDS et les forces américaines doivent redoubler d'efforts pour protéger les civils en évitant notamment des frappes aveugles et disproportionnées et en créant des routes de sortie sécurisées", ajoute Mme Rovera.

L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) a recensé la mort de 167 civils par les raids de la coalition internationale dirigée par les États-Unis depuis le 14 août.

Cette coalition assure prendre toutes les précautions pour éviter de faire des victimes parmi les civils, tout en reconnaissant début août être responsable de la mort de 624 civils dans des bombardements depuis le début des frappes en 2014 en Syrie et en Irak.

Certaines organisations affirment que ce chiffre est largement sous-estimé.

La coalition a également reconnu que le nombre de ses raids avait augmenté à Raqa, notamment après l'éviction le mois dernier de l'EI de Mossoul en Irak.

'Fin du monde'

Amnesty a critiqué les méthodes d'enquête de la coalition qui, selon l'ONG, évite de se rendre sur place et n'interroge pas des témoins.

"Se baser sur une méthodologie aussi restreinte conduit la coalition à écarter la majorité des rapports, jugés 'non crédibles' ou peu concluants, et par conséquent à affirmer que les victimes civiles ne représentent que 0,31% des (morts) dans l'ensemble des raids", assure le rapport.

En plus des frappes aériennes, les civils de Raqa sont sous la menace du feu intense d'artillerie sur des secteurs densément peuplés, encore sous le contrôle de l'EI.

Dans un incident sur lequel Amnesty a enquêté, une douzaine d'obus ont touché un immeuble résidentiel, tuant au moins 12 personnes, dont un enfant.

"C'était indescriptible. C'était comme la fin du monde", affirme un témoin cité par l'organisation.

Amnesty a appelé à la création d'un mécanisme d'enquête indépendant et impartial pour examiner les informations sur les victimes civiles.

Elle assure que l'EI tente d'utiliser les civils comme des boucliers humains. Des habitants fuyant la ville sont également pris sous le feu des tireurs embusqués de l'EI, d'après l'ONG.

"Mais les violations commises par l'EI n'atténuent pas les obligations légales internationales des autres belligérants à protéger les civils", assure Mme Rovera.

Même en dehors de la ville, les civils sont l'objet d'attaques dans des camps informels au sud de Raqa de la part des forces du régime qui utilisent des armes à sous-munitions, bannies internationalement, affirme Amnesty.

Avec AFP