Dans un pays en état d'alerte renforcée, cette attaque, la septième d'ampleur à frapper le pays depuis l'été dernier, a visé la fameuse et très commerçante avenue Istiklal, sur la rive européenne de la mégapole stambouliote, ou transitent chaque jour des centaines de milliers de personnes.
Selon un bilan provisoire publié par le gouverneur d'Istanbul, Vasip Sahin, l'attentat a été commis par un "kamikaze" et a fait au moins quatre morts et 20 blessés, dont trois grièvement atteints.
"C'est bien un attentat suicide, une attaque terroriste", a déclaré M Sahin devant la presse, précisant que son auteur avait été lui aussi tué par la déflagration, vraisemblablement d'une ceinture d'explosifs.
Selon M. Sahin, ce "kamikaze" visait en fait un bâtiment officiel situé dans le voisinage, "la sous-préfecture du quartier de Beyoglu".
L'attentat de l'avenue Istiklal n'a fait l'objet d'aucune revendication immédiate.
"On a entendu une forte explosion. On s'est approché de la fenêtre et là j'ai vu des morceaux de corps collés aux vitres", a raconté à l'AFP un témoin, Ahmet, qui vit dans un immeuble situé juste en face de l'attaque. "Ensuite, la police nous a évacués", a-t-il ajouté.
"J'étais sur la place Taksim quand j'ai entendu une forte détonation. J'ai senti la terre trembler et puis j'ai vu des policiers et des ambulances passer", a pour sa part indiqué, Abdullah, un cireur de chaussures. "Quand ma fille m'a appelé, j'ai tout de suite compris que c'était grave".
La rue Istiklal a été évacuée après l'attentat, ainsi qu'une bonne partie de la place Taksim située en amont de l'artère, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Un hélicoptère de la police surveillait à basse altitude la zone, où de nombreux policiers, armes à la main, ont été déployés face à des touristes étrangers interloqués.
Alerte renforcée
La Turquie vit en état d'alerte renforcée depuis l'été dernier après une série d'attentats meurtriers attribués aux jihadistes du groupe Etat islamique (EI) ou aux rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui ont repris leurs affrontements avec les forces de sécurité turques.
Le dernier en date, dimanche dernier, une attaque à la voiture piégée qui a visé un arrêt de bus en plein centre d'Ankara, a fait 35 tués et plus de 120 blessés. Le 17 février, un précédent attentat du même type avait déjà fait 29 morts, déjà dans la capitale turque.
Ces deux attaques ont été revendiquées par un groupe radical kurde proche des rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK) en représailles à la mort de civils pendant les opérations de l'armée et la police contre la rébellion dans plusieurs villes du sud-est anatolien.
Les TAK ont promis d'autres actions contre l'Etat turc. Face à cette menace, le niveau d'alerte a été renforcé dans de nombreuses grandes villes du pays.
L'Allemagne a fermé jeudi son ambassade à Ankara, son consulat général à Istanbul et ses écoles dans les deux villes en raison d'un risque d'attentat. Le consulat et les deux établissements scolaires sont également restés fermés vendredi.
En janvier, 12 touristes allemands avaient été tués dans un attentat-suicide, attribué à l'EI dans le centre historique d'Istanbul.
L'ambassade des Etats-Unis à Ankara a également mis en garde ses ressortissants en Turquie contre de possibles attentats et leur a recommandé d'"éviter tout rassemblement politique ou manifestation" lors du fêtes du Nouvel an kurde prévues dimanche et lundi.
Embarrassé par les critiques qui dénoncent les ratés de ses services de sécurité, le président Recep Tayyip Erdogan a réagi en relançant la guerre contre les "complices" des "terroristes" kurdes, élus, intellectuels ou journalistes.
Depuis plusieurs jours, il presse le Parlement de lever l'immunité de députés prokurdes poursuivis pour "propagande terroriste" et la police multiplie les arrestations de partisans de la cause kurde, suscitant de nouvelles réactions indignées en Europe.
Vendredi, M. Erdogan a accusé l'Europe de complaisance pour la rébellion kurde, au moment où son pays signait à Bruxelles un accord sur les migrants.
"Une nouvelle fois, j'en appelle aux pays qui soutiennent directement ou indirectement les organisations terroristes: vous nourrissez une vipère en votre sein", a lancé M. Erdogan.
Avec AFP