Lors d'une visite en Grèce, en première ligne de la pire crise migratoire de l'histoire européenne, M. Tusk a tenté de décourager les migrants économiques.
"Ne venez pas en Europe. Ne croyez pas les passeurs. Ne risquez pas vos vies et votre argent. Tout cela ne servira à rien", a lancé M. Tusk à Athènes.
"Ni la Grèce, ni aucun autre pays européen ne pourront continuer à être des pays de transit", a-t-il prévenu, "les réglementations de Schengen seront à nouveau appliquées".
Mercredi, en Slovénie, M. Tusk avait estimé qu'un retour aux dispositions de la zone Schengen, incluant des contrôles rigoureux à ses frontières extérieures, était une condition "préalable" à une solution à la crise des migrants.
Dans l'après-midi, M. Tusk a profité d'un entretien avec le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu pour rappeler que le flot des migrants restait "encore beaucoup trop élevé".
"D'autres mesures sont nécessaires" pour enrayer ce flux, a jugé le responsable européen, suggérant la mise en place d'un "mécanisme rapide et à grande échelle destiné à renvoyer les migrants irréguliers qui arrivent en Grèce".
La Turquie a fait savoir mercredi qu'elle était prête à signer avec quatorze pays un accord de réadmission sur son sol des migrants clandestins.
Elle a signé en novembre dernier avec l'UE un accord l'engageant à ralentir le flux des migrants en échange d'une aide de 3 milliards d'euros et d'une accélération de sa procédure de candidature à l'Union européenne.
- 'Tout ce qui est nécessaire' -
Mais cet accord n'a pas donné les résultats escomptés, provoquant la frustration des Européens qui reprochent à la Turquie, qui accueille 2,7 millions de réfugiés syriens, de ne pas jouer le jeu.
M. Davutoglu s'est défendu jeudi en répétant que son pays était déterminé à "faire tout ce qui était nécessaire" pour lutter contre les migrations clandestines.
Avant le sommet UE-Turquie de lundi à Bruxelles, M. Tusk devait conclure vendredi sa tournée par un entretien à Istanbul avec le président turc Recep Tayyip Erdogan.
Alors que plus de 11.500 migrants sont toujours bloqués à la frontière de la Grèce avec la Macédoine, M. Tusk a également critiqué jeudi les actions "unilatérales" de certains pays membres de l'UE qui ont imposé des quotas à l'entrée de leurs territoires.
"Des décisions unilatérales sans une coordination préalable, même si elles sont compréhensibles dans un contexte national, portent atteinte à l'esprit européen de solidarité", a-t-il affirmé.
La fermeture partielle des frontières sur la route des Balkans, empruntée par les réfugiés qui veulent rejoindre l'Europe du Nord, a piégé des milliers de personnes en Grèce, faisant planer, selon l'ONU, la menace d'une crise humanitaire imminente.
Incapables d'apporter une réponse coordonnée, les Européens se déchirent alors que les flux sont loin de diminuer, avec plus de 130.000 migrants arrivés en Europe depuis janvier, selon le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR), après un million l'an dernier.
- Fardeau migratoire -
Selon le ministre adjoint de la Défense grec Dimitres Vitsas, près de 32.000 réfugiés et migrants se trouvent actuellement sur le sol grec, dont "6.857 dans les îles" et "24.985 sur le continent".
"La Grèce ne peut pas gérer toute seule" ce fardeau migratoire, a répété jeudi son Premier ministre Alexis Tsipras, déplorant "la faiblesse" de l'UE à gérer le flux migratoire.
Pour aider ses Etats membres en première ligne, sur la route des migrants, l'UE a proposé mercredi une aide humanitaire d'urgence de 700 millions d'euros.
A la frontière entre la Grèce et la Macédoine, la situation restait tendue, Skopje continuant de filtrer les entrées à Idomeni, avec seulement 500 passages de réfugiés syriens et irakiens autorisés depuis mardi.
En France, sur la route de migrants qui veulent rejoindre le Royaume-Uni, le démantèlement d'une partie de la "jungle" de Calais (nord) a repris jeudi pour le quatrième jour consécutif dans une ambiance tendue.
Cette partie de la "jungle" abrite entre 800 et 1.000 migrants selon les autorités, mais près de 3.500 d'après les associations. Entre 3.700 et 7.000 au total, surtout syriens, afghans et soudanais, vivent dans des conditions précaires dans l'ensemble du camp.
La France a averti jeudi qu'elle ne pourrait retenir ces migrants en cas de Brexit. "Il y aura des conséquences si le Royaume-Uni quitte l'UE (...)y compris sur la manière de gérer les situations en matière de migrations", a déclaré le président français François Hollande à l'issue d'un sommet avec le Premier ministre britannique David Cameron à Amiens, à 150 km de la "jungle".
Avec AFP