"Il faut que ce processus électoral ne soit pas pris en otage par l'incapacité du gouvernement actuel à organiser les élections", a estimé jeudi Aliou Boubacar Diallo, candidat à la présidentielle du 29 juillet, dans un entretien avec l'AFP lors d'un séjour à Paris.
"Nous devons tous nous impliquer, opposition, majorité, partenaires bilatéraux et multilatéraux" pour que cette élection "ne soit pas une mascarade", a-t-il relevé, demandant "l'implication de l'OIF (Organisation internationale de la Francophonie, NDLR), de l'Union européenne et de la Minusma (Mission de l'ONU au Mali) pour que ces élections puissent se faire".
Pays pauvre d'Afrique de l'Ouest, le Mali fait face à une menace jihadiste persistante, malgré la signature en mai-juin 2015 d'un accord de paix - censé isoler définitivement les groupes liés à Al-Qaïda - mais dont l'application accumule les retards.
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Des zones entières du pays échappent au contrôle des forces du Mali, de la France - à l'initiative d'une intervention militaire internationale depuis 2013 - et de l'ONU, régulièrement visées par des attaques meurtrières.
Les élections régionales, déjà reportées de décembre à avril, ont de nouveau été repoussées à la fin de l'année. Les élections municipales, elles, avaient dû être reportées à plusieurs reprises, pour se tenir en novembre 2016 sur une partie seulement du territoire en raison des violences.
"Le régime IBK (initiales du président Ibrahim Boubacar Keïta) a montré sa grande incapacité à organiser des élections, on ne doit pas le laisser seul organiser ces élections-là", a martelé M. Diallo. "C'est important que ces élections se fassent et de manière transparente et crédible, il en va de la survie même de l'Etat du Mali".
M. Diallo, 58 ans, est notamment propriétaire d'une mine d'or au Mali. Il a des actifs dans les secteurs pétrolier et gazier, et a créé en 2003 une fondation, Maliba, qui apporte de l'aide humanitaire dans plusieurs régions du pays. Ce "fils de cheminot" et d'une mère au foyer, né dans une famille polygame de Kayes (ouest), se présente comme un "self made man" qui "a gravi tous les échelons".
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Après avoir soutenu le président Keïta, son parti (l'Alliance démocratique pour la paix - ADP-Maliba) a quitté en 2016 la majorité pour rejoindre les rangs de l'opposition. "IBK nous avait promis" la "paix", une "décentralisation poussée", une "sécurité" et "on n'a rien eu", dit-il.
Bien que M. Diallo se présente pour la première fois à une élection, c'est, de son point de vue, loin d'être un handicap. "Ceux qui ont fait de la politique depuis l'indépendance au Mali ne nous ont pas empêchés d'aller dans le trou dans lequel nous nous trouvons. Il y a une nécessité d'aller vers des hommes neufs avec une façon différente de faire pour pacifier, sécuriser le pays et exploiter les énormes ressources".
M. Diallo a été intronisé en mars candidat de son parti à Nioro du Sahel (nord-ouest), fief du chérif Bouyé Haïdara, un dirigeant religieux musulman très respecté et influent.
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Selon M. Diallo, "ces leaders religieux modérés ont un rôle important à jouer pour que les communautés (locales) ne basculent pas" du côté des groupes terroristes. "Dans une bonne partie du Mali, l'administration est absente, les seuls que les populations voient dans ces régions-là sont les terroristes, les rebelles qui sont aux petits soins", a-t-il poursuivi.
"Ne voyant pas l'Etat", ces communautés se disent que ces groupes terroristes ou rebelles "sont là pour régler leurs problèmes, même si c'est un mirage", a-t-il ajouté.
Avec AFP