Un mini-sommet sur les migrations pour tenter de sortir de la cacophonie européenne

Des migrants se tiennent sur le pont de l'Aquarius alors que le navire entre dans le port de Valence, le 17 juin 2018.

Les dirigeants de seize pays européens vont essayer dimanche à Bruxelles d'apaiser les tensions dans l'UE face au défi migratoire, illustrées par nouveau un bras de fer autour d'un navire transportant des migrants, le Lifeline, à qui l'Italie et Malte refusent l'accostage.

A la veille de cette "réunion informelle", le ton est une nouvelle fois monté entre la France et l'Italie, où le nouveau gouvernement populiste a fustigé l'"arrogance" d'Emmanuel Macron après sa proposition de "centres fermés" pour les migrants dans les pays de première arrivée.

Désormais tous d'accord pour renforcer les frontières extérieures de l'UE, les Européens n'en finissent plus de se diviser sur leurs responsabilités dans la prise en charge des migrants tentant de rejoindre l'Europe, comme de ceux s'y trouvant déjà.

"La situation est risquée", a admis une source diplomatique, car faute de solution européenne "ce sera la fermeture des frontières nationales et donc la remise en cause de l'espace Schengen, donc de l'UE".

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La réunion de dimanche, organisée par la Commission, réunit 16 pays pour déminer le terrain du Conseil européen à 28 des 28-29 juin.

Les pays du groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovaquie) ont dit ne pas être intéressés.

"J'ai malheureusement peu d'espoir d'un résultat important", a avoué le chancelier autrichien Sebastian Kurz, dont le pays prendra la tête le 1er juillet de la présidence tournante de l'UE.

"Sauver Merkel"

L'objectif affiché par Bruxelles est d'éviter la multiplication de décisions unilatérales, à l'image de celle de Rome de fermer ses ports aux navires d'ONG secourant des migrants, comme l'Aquarius il y a peu et désormais le Lifeline et ses 239 passagers, dont quatre bébés, en attente d'une solution dans les eaux internationales.

"Nous vous invitons cordialement à vous convaincre que ce sont des êtres humains que nous sauvons de la noyade", a lancé dimanche l'ONG allemande Mission Lifeline au ministre italien d'extrême droite Matteo Salvini, qui avait évoqué la cargaison de "chair humaine" de son navire.

"Il ne peut y avoir de réponse unilatérale" à la question migratoire, a insisté dimanche, dans un entretien à El Pais, le nouveau chef du gouvernement Pedro Sanchez, qui avait ouvert un port espagnol pour mettre fin à l'odyssée de l'Aquarius. Il faut "une réponse européenne commune", a-t-il plaidé.

La chancelière allemande Angela Merkel et le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez assistent à un sommet d'urgence des dirigeants de l'Union européenne sur l'immigration au siège de la Commission européenne à Bruxelles, en Belgique, le 24 juin 2018.

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L'une des principales craintes est désormais de voir l'Allemagne instaurer un refoulement unilatéral aux frontières des migrants, comme menace de le faire le ministre allemand de l'Intérieur, contre l'avis de la chancelière Angela Merkel.

"L'idée au départ de cette réunion, c'était un peu de sauver Merkel", a souligné une source diplomatique.

Un document qu'avait préparé la Commission pour dimanche contenait ainsi un catalogue de mesures contre le phénomène des "mouvements secondaires" de migrants qui voit les demandeurs d'asile se déplacer dans l'UE, au lieu de rester dans le pays par lequel ils sont entrés dans l'attente d'une décision sur leur cas.

Le texte insistait sur les obligations des pays de première entrée, comme l'Italie, et sur la nécessité de pouvoir y renvoyer effectivement les personnes qui y sont ou auraient dû y être enregistrées.

Au point de provoquer la colère de Rome, qui a envisagé de boycotter le mini-sommet. Mais Mme Merkel a "éclairci les choses", s'est félicité le Premier ministre italien Giuseppe Conte, assurant que l'Italie ne serait pas contrainte d'accepter des mesures pré-définies.

Macron "ennemi" de Rome

La rencontre de dimanche devrait se conclure par "un résumé des positions exprimées", selon une source européenne.

La France et l'Espagne proposeront de créer des "centres fermés sur le sol européen", dotés de "moyens européens", où les migrants attendraient l'examen de leur cas, a déjà annoncé samedi le président français Emmanuel Macron.

"Si l'arrogance française pense transformer l'Italie en camp de réfugiés pour toute l'Europe, peut-être en versant quelques euros de pourboire, elle se fourvoie complètement", lui a répliqué le ministre italien d'extrême droite Matteo Salvini.

"Macron fait de son pays un candidat pour devenir l'ennemi public numéro un de l'Italie", a renchéri le ministre Luigi di Maio, chef de file du Mouvement Cinq Etoiles (M5S, antisystème).

L'accélération des renvois des migrants illégaux et des déboutés de l'asile sera aussi au menu dimanche. Comme les idées encore floues de centres d'accueil de migrants hors de l'UE ou de "plateformes régionales de débarquement" des migrants secourus en mer, dans et hors de l'UE.

Les 16 devront évoquer enfin la réforme du régime d'asile européen, dans l'impasse depuis plus de deux ans.

La Commission propose notamment de retoucher le Règlement de Dublin, qui confie la responsabilité des demandes d'asile aux pays de première entrée. En cas de crise comme celle de 2015, l'exécutif européen plaide pour une répartition ponctuelle des demandeurs d'asile dans l'UE.

Les pays méditerranéens souhaitent eux une répartition permanente. Les quatre pays de Visegrad, soutenus par l'Autriche, rejettent frontalement cette proposition.

Avec AFP