Un nouveau cardinal, une lueur d'espoir pour la Centrafrique

Dieudonné Nzapalainga à Washington, le 18 mars 2014

"Je n'ai pas été appelé pour moi-même, j'ai été appelé pour notre pays": l'archevêque de Bangui, Dieudonné Nzapalainga, a immédiatement placé sa nomination au rang de cardinal par le pape François sous le signe de la réconciliation en Centrafrique, pays toujours menacé par les groupes armés.

Onze mois après son voyage à Bangui en novembre 2015, le pape argentin tente, avec cette nomination, un nouveau geste pour la paix dans ce pays pauvre de 4,5 millions d'habitants ravagé depuis 2013 par des violences entre groupes armés pro-Séléka, à dominante musulmane, et milices anti-balaka, majoritairement chrétiennes.

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Dieudonné Nzapalainga joint par Felix Yépassis-Zembrou

Chrétiens ou musulmans, les habitants de la capitale ont communié dans un rare moment de réjouissance à l'annonce de la promotion de l'archevêque de Bangui, benjamin, à 49 ans, des 17 nouveaux cardinaux créés par le pape.

"C'est une nouvelle ère qui s'ouvre pour notre pays. Dieu nous invite à faire la paix, saisissons cette grâce", a déclaré à l'AFP Serge Makandjia Ngonzalo, un catholique.

Des milliers de personnes se sont massées dimanche soir le long des avenues de la capitale pour ovationner et accompagner l'enfant du pays à la cathédrale Notre-Dame de l'Immaculée conception où il a délivré son premier message de cardinal, d'après un correspondant de l'AFP. La gendarmerie a dû encadrer son véhicule pour le faire avancer à travers la foule en transe.

"C'est après une grave crise que le pape est venu dans notre pays. Et c'est encore après la résurgence des violences ces derniers jours que le pape m'a promu cardinal. Je vous le dis, il y a un Dieu pour les pauvres", a déclaré en sango le nouveau cardinal, formé auprès de la congrégation des Spiritains et aumônier à la fondation caritative des Apprentis d'Auteuil à Marseille (sud de la France) pendant plusieurs années.

Malgré trois ans d'opération française Sangaris qui prend fin ce mois-ci, malgré la présence de 12.000 Casques bleus de la Mission des Nations unies en Centrafrique (Minusca), le pays reste une poudrière, comme l'a rappelé l'assassinat la semaine dernière d'un commandant de l'armée au quartier musulman du PK5 et son cortège de représailles (11 morts au total).

'Soif de paix'

"Très rapidement je serai au PK5 pour rencontrer mes frères. Je dis bien mes frères, pour qu'ensemble nous puissions faire revenir la paix au PK5 et dans notre pays", a lancé le nouveau cardinal.

Salués sur le parvis de la cathédrale, ces propos ont mis du baume au coeur des habitants du PK5 encore traumatisés par les violences de la semaine dernière.

"C'est un homme de paix et nous avons soif de paix. Nous aurions aimé le voir, le féliciter. Mais nous ne pouvons pas mettre le nez dehors maintenant qu'il fait nuit au PK5", a déclaré à l'AFP Mariam Haïdara, habitante de ce quartier musulman jointe par téléphone.

"Nous étions tous là, attendant de le voir passer. Mais on nous a laissé entendre que le protocole n'a pas souhaité le faire passer nuitamment au PK5", a confié un autre habitant, Ahmat Kalil, qui ajoute: "Il fait notre fierté, c'est la première fois qu'un fils du pays accède aux fonctions de cardinal, c'est historique".

L'imam Omar Kobine Layama a aussi salué la promotion de son partenaire pour la paix aux pires heures de l'histoire du pays au sein d'une plate-forme oecuménique: "C'est une nomination qui honore notre pays et aussi la plate-forme religieuse qui réunit les catholiques, musulmans et protestants. Cela prouve que les efforts de la plateforme religieuse ne sont pas vains", a-t-il dit.

Reste à savoir si cette promotion aura une influence sur les chefs de guerre des groupes armés, qui refusent toujours de rejoindre le programme de démobilisation des Nations unies.

Avec AFP