Nomination d'un Premier ministre de "consensus" pour sortir de la crise à Madagascar

Christian Ntsay, le nouveau Premier ministre de Madagascar. (Facebook/Présidence de la République de Madagascar)

Le président malgache Hery Rajaonarimampianina a nommé Premier ministre un haut fonctionnaire international, Christian Ntsay, qui sera chargé de former un gouvernement de "consensus" pour tenter de sortir le pays de la crise politique.

"J'ai nommé Premier ministre Christian Ntsay, un homme expérimenté et ayant les compétences pour l'apaisement", a déclaré M. Rajaonarimampianina devant la presse.

Cette nomination intervient quelques heures à peine après la démission à la mi-journée du précédent chef du gouvernement, Olivier Mahafaly Solonandrasana, en poste depuis deux ans.

L'île de Madagascar est secouée depuis un mois et demi par une vague de manifestations quotidiennes de l'opposition qui exigent le départ du président Hery Rajaonarimampianina, au pouvoir depuis 2013, accusé de vouloir faire taire ses rivaux à quelques mois des prochaines élections générales.

Pour tenter de sortir de l'impasse, la Haute Cour constitutionnelle (HCC), la plus haute instance juridique du pays, a ordonné il y a dix jours la nomination d'un nouveau Premier ministre et d'un gouvernement d'union nationale.

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M. Mahafaly Solonandrasana s'est exécuté lundi en présentant sa démission et celle de son équipe.

"En tant qu'homme d'État, je ne vais pas me présenter comme un obstacle à la vie de la nation", a-t-il déclaré à la presse avant de rencontrer le chef de l'Etat. "Je n'ai rien à regretter aujourd'hui et je peux partir la tête haute (...) je vous dis 'Ce n'est qu'un au revoir'", a-t-il ajouté, sibyllin.

'Arrangement politique'

Son successeur Christian Ntsay, âgé de 57 ans, occupait jusqu'à ce jour un poste de haut fonctionnaire à l'Organisation internationale du travail (OIT). Il a exercé les fonctions de ministre du Travail de 2002 à 2003, mais n'est membre d'aucun des trois principaux partis du pays.

M. Ntsay a désormais la lourde tâche de composer un cabinet d'union dont la composition reflète les résultats des élections législatives de 2013, ainsi que l'a imposé la Haute-cour constitutionnelle dans sa décision.

Cette exigence nourrit depuis plusieurs jours une vive polémique entre les deux camps, qui revendiquaient tous les deux la majorité dans une Assemblée nationale où de nombreux élus ont changé de camp.

Le parti présidentiel HVM avait déclaré sa préférence pour la nomination d'un Premier ministre "neutre". Mais l'opposition avait clairement exigé celle d'un parlementaire de son camp, ce que le chef de l'Etat avait refusé samedi.

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"J'en appelle aux leaders politiques pour respecter cet arrangement politique", a demandé lundi le chef de l'Etat.

"L'année 2018 est une année de renforcement de la démocratie par l'alternance à travers les élections", a-t-il souligné, "ce renforcement de la démocratie passe par une élection ouverte à tous, transparente et acceptée par tous".

Partie du rejet par l'opposition des nouvelles lois électorales, la crise actuelle a dégénéré en fronde généralisée contre le chef de l'Etat, qui a jusqu'à présent refusé de se plier aux appels répétés à la démission.

Deux partisans de l'opposition ont été tués le 21 avril, au tout premier jour des rassemblements sur la place du 13-Mai à Antananarivo, haut lieu historique de la contestation. Les manifestations sont depuis restées pacifiques.

Pression militaire

L'Union africaine (UA), l'Union européenne (UE) et les Nations unies sont rapidement intervenues au chevet de Madagascar pour essayer de résoudre cette énième crise de son histoire récente. Mais elles ont jusqu'à présent échoué, tout comme les tentatives de médiation nationale.

La semaine dernière encore, le chef de l'Etat et les dirigeants de l'opposition ont ainsi boudé une réunion organisée par le Conseil national pour la réconciliation.

Jeudi dernier, le ministre de la Défense Béni Xavier Rasolofonirina a tapé du poing sur la table en menaçant de faire intervenir les forces de l'ordre si le gouvernement et l'opposition ne trouvaient pas rapidement une porte de sortie "dans les délais imposés par la Haute-cour constitutionnelle".

Cette crise a éclaté à quelques mois des élections générales. Elles étaient prévues en novembre et décembre, mais la HCC a imposé qu'elles se déroulent dès la "saison sèche", c'est-à-dire entre mai et septembre prochains.

Le président Rajaonarimampianina, élu fin 2013, n'a pas annoncé s'il comptait se représenter pour un autre mandat.

En revanche, les deux principaux chefs de l'opposition - Marc Ravalomanana, président de 2002 à 2009, et Andry Rajoelina, au pouvoir de 2009 à 2014 - ont déjà laissé entendre qu'ils étaient prêts à se lancer dans la bataille.

Longtemps frères ennemis de la politique malgache, les deux dirigeants font aujourd'hui cause commune contre le régime.

Avec AFP