Une ONG dénonce des "attaques" contre le bureau d'Amnesty International au Nigeria

Des enfants transportent des chaises en plastique récupérées des maisons démolies et ince.ndiées par des fonctionnaires du gouvernement à Lekki, Lagos, au Nigeria, 12 novembre 2016

Une des principales organisations des droits de l'Homme au Nigeria a dénoncé mardi des "attaques" visant le bureau d'Amnesty International à Abuja ces derniers jours, demandant aux autorités d'ouvrir une enquête, alors que l'armée a récemment accusé Amnesty de vouloir déstabiliser le pays.

Lundi, "un groupe de manifestants a barricadé le bureau d'Amnesty International et demandé à l'organisation internationale de quitter le Nigeria dans les 24 heures", s'indigne dans un communiqué signé du Socio-Economic Rights and Accountability Project (Serap).

Le Serap demande au président Muhammadu Buhari "une enquête approfondie sur les attaques apparemment sponsorisées et coordonnées contre le bureau d'Amnesty International au Nigeria et de garantir la sécurité de son personnel".

L'ONG nigériane demande au gouvernement de "nommer et dénoncer publiquement les commanditaires, et de les traduire en justice" afin d'"envoyer un message fort de protection et de soutien à la société civile".

"Certains n'apprécient peut-être pas certaines choses qu'Amnesty International a dites, mais cela ne justifie en aucune façon ce genre d'attaque collective contre son bureau et ses employés", poursuit le Serap.

Depuis un an, Amnesty a dénoncé à plusieurs reprises les exactions contre des civils commises par les forces de sécurité nigérianes, déclenchant l'ire des autorités qui ont nié en bloc les accusations.

Selon l'ONG, l'armée a tué délibérément 350 musulmans d'une minorité chiite fin 2015 dans le nord du pays, avant d'enterrer leurs corps dans des fosses communes.

En juin 2016, Amnesty a dénoncé en outre l'exécution par les forces de l'ordre de militants indépendantistes non armés, avant et pendant une manifestation marquant l'anniversaire du début de la guerre du Biafra (sud).

Fin février, le ministère de la Défense avait accusé dans un communiqué Amnesty de "s'ingérer dans la politique locale et de prendre parti pour des terroristes et d'autres groupes belligérants afin de provoquer des désordres internes", demandant à l'ONG "de renoncer à se mêler des questions de sécurité dans notre pays, ce qui nuit à l'intérêt national, à la cohésion et à l'unité".

L'armée avait finalement annoncé début mars l'ouverture d'une enquête sur certaines allégations, concernant notamment des cas d'"exécutions extrajudiciaires, arrestations arbitraires, tortures et disparitions forcées" à l'encontre de membres présumés du groupe islamiste Boko Haram.

Aujourd'hui, l'armée joue toujours un rôle majeur au Nigeria, en proie à plusieurs conflits armés, et qui n'a renoué la démocratie qu'en 1999, après des décennies de dictature militaire.

Le président Buhari est un ancien général qui fut une première fois au pouvoir au début des années 1980, après un coup d'état.

Avec AFP