Viol collectif en Inde : rejet d'un recours contre la libération d'un agresseur

La Cour suprême indienne a rejeté un recours intenté contre la libération du plus jeune condamné dans le viol collectif et le meurtre d'une étudiante à New Delhi, une affaire qui avait bouleversé le pays en 2012 tout en mettant en exergue les violences subies par les femmes.

La Cour suprême indienne a rejeté lundi un recours intenté contre la libération du plus jeune condamné dans le viol collectif et le meurtre d'une étudiante à New Delhi, une affaire qui avait bouleversé le pays en 2012 tout en mettant en exergue les violences subies par les femmes.

L'indignation que suscite cette libération est vive mais la juridiction suprême a estimé qu'il n'existait aucun argument légal pouvant justifier le maintien en détention de l'intéressé qui a purgé sa peine.

Saisie par Swati Maliwal, présidente de la Commission des femmes de New Delhi, la Cour suprême a estimé "que rien dans la loi" n'autorisait la justice à ordonner que le condamné retourne derrière les barreaux.

"Le système toute entier a trahi les femmes de ce pays", a déclaré Mme Maliwal à la presse.

Le père de la victime, Jyoti Singh, une étudiante en kinésithérapie de 23 ans devenu le symbole du sort souvent peu enviable réservé aux femmes dans un pays où les violences sexuelles sont légion, a laissé échapper toute son amertume en apprenant la nouvelle.

"Qu'est-ce que je peux dire?", a dit Badrinath Singh à l'AFP. "Il n'y a pas de mots pour décrire notre déception. Nous ne comprenons pas toutes ces lois, nous savons seulement que le système nous a trahis", a -t-il dit.

Le jeune homme libéré avait été condamné à trois ans de prison, soit la peine maximale prévue pour les mineurs, car il avait 17 ans au moment des faits.

Six hommes au total avaient participé à l'agression ultra violente survenue dans un autobus privé en décembre 2012 à New Delhi.

La victime venait de passer la soirée au cinéma avec un ami. Le couple avait été séquestré à bord de l'autobus, où la jeune femme a été violée tour à tour par ses agresseurs, y compris avec une barre en métal, avant d'être jetée sur le bord de la route.

Elle est morte d'une hémorragie interne près de deux semaines après dans un hôpital de Singapour.

Quatre adultes ont été condamnés à mort en 2014 et ont fait appel de leur sentence devant la Cour suprême. Le sixième participant s'est suicidé en prison avant le procès.

- 'Permis de violer' -

La mère de la victime, Asha Devi, a estimé que cette décision montrait que l'Inde n'avait pas "tiré les leçons" du drame.

"Au fond, ils ont accordé aux jeunes criminels un permis qui stipule qu'avant l'âge de 18 ans, on a le droit de violer les filles, de faire ce qu'on veut, car aucune punition n'est prévue dans le code pénal", a-t-elle dit. "Ils ne se soucient que des hommes. Les femmes sont trahies, comme elles l'ont toujours été".

Les parents de Jyoti avaient été brièvement interpellés dimanche lorsque la police avait dispersé, pour raisons de sécurité, un rassemblement de manifestants qui entendaient protester contre cette libération.

Une nouvelle manifestation est prévue lundi près du Parlement.

La nouvelle de la libération du plus jeune condamné a été rendue publique dimanche mais il avait été placé auprès d'une association de bienfaisance dès le 9 décembre, d'après des sources policières.

Selon son avocat, il aurait aimé rentrer chez lui, dans l'Uttar Pradesh, mais a peur d'y retourner.

"Il est libre, se trouve dans le refuge, et en sortira dans quelques jours", a déclaré cet avocat, A.P. Singh, au journal Indian Express. "Il devait rentrer chez lui mais il y a des manifestations et des camionnettes de télévision. Nous n'avons pas pu parler à sa mère".

Aux termes de la loi indienne, l'identité des victimes de crimes sexuels ne peut être rendue publique. Mais la semaine dernière, les parents de Jyoti ont demandé à ce que le nom de l'agresseur soit mis sur la place publique.

Le crime avait suscité une émotion mondiale et déclenché des manifestations très importantes en Inde.

L'agression a mis au jour le niveau élevé de violences envers les femmes et entraîné un durcissement de la loi sur les violences sexuelles.

L'Inde a enregistré 36.735 affaires de viol en 2014, dont 2.096 à Delhi, mais les spécialistes estiment qu'il s'agit seulement de la partie émergée de l'iceberg.

Avec AFP