Élection des Etats-Unis et de l'Erythrée au Conseil des droits de l'homme de l'ONU

La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme Michelle Bachelet et le Secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres assistent à une session du Conseil des droits de l'homme aux Nations Unies à Genève, Suisse, le 24 février 2020. REUTERS/Denis Balibouse

Les Etats-Unis, après quelque 4 ans d'absence dont a profité la Chine, et l'Erythrée, accusé par des ONG de violations des droits humains, ont été élus jeudi par l'Assemblée générale des Nations Unies pour un mandat de trois ans au Conseil des droits de l'homme.

Dix-huit pays étaient candidats pour 18 postes à pourvoir avec une entrée en fonctions prévue le 1er janvier. Le vote était à bulletins secrets.

Outre les Etats-Unis (seulement 168 voix obtenues) et l'Erythrée (144 voix), ont été élus à la majorité des voix (soit au moins 97 votes) des 193 membres de l'ONU les pays suivants: Bénin (189 voix), Cameroun (179 voix), Gambie (186 voix), Somalie (171 voix), Emirats arabes unis (180 voix), Inde (184 voix), Kazakhstan (184 voix), Malaisie (183 voix), Qatar (182 voix), Lituanie (178 voix), Monténégro (178 voix), Argentine (175 voix), Honduras (172 voix), Paraguay (185 voix), Finlande (180 voix) et Luxembourg (180 voix).

L'arrivée de l'Erythrée dans le cénacle de 47 membres pose à nouveau la question de la présence de régimes autoritaires violant les droits humains au sein de la plus haute instance des droits de l'homme de l'ONU.

"Les Chinois et tous ceux qui fondamentalement ne sont pas en faveur des droits de l'homme tels que (nous) les Européens les concevons (...) opposent des droits économiques, sociaux et culturels. Cela ne date pas de maintenant mais la tendance se renforce indéniablement", déclare à l'AFP un diplomate européen.

Selon un autre diplomate européen, "l'objectif de la Chine est simple: détruire le concept d'universalité des droits de l'Homme et faire valoir une vision conforme à son système politique".

La Chine et plusieurs de ses partenaires, dont le Bélarus et le Venezuela, ont multiplié ces dernières années les déclarations conjointes soutenant l'action de Pékin à Hong Kong, au Xinjiang et au Tibet, et dénoncé "les violations des droits humains" dans les pays occidentaux, y compris contre les autochtones canadiens.

Face à cette polarisation croissante, certains craignent que le retour des Américains renforce cette tendance, même si d'autres soulignent que les Etats-Unis n'ont pas eu besoin d'être présents dans la salle pour exercer leur influence.

"Mascarade électorale" -

"Avec la présence des cinq membres (permanents -- Etats-Unis, Russie, Chine, Royaume-Uni et France) du Conseil de sécurité dans le Conseil des droits de l'homme, on peut penser effectivement que les Chinois et les Américains ne se feront pas de cadeaux (et) utiliseront le Conseil comme une des arènes où ils exposeront leurs rivalités", souligne le premier diplomate européen.

A la tête du centre de réflexion Universal Rights Group à Genève, Marc Limon regrette que les Etats-Unis "se (soient) essentiellement concentrés sur la Chine" depuis leur retour comme observateur au CDH cette année.

"Beaucoup de pays en ont assez parce qu'ils ne veulent pas voir le système multilatéral pris en otage", dit-il à l'AFP, en appelant Washington à élargir les thématiques pour récupérer le soutien de pays en développement désormais tournés vers Pékin.

L'ambassadeur chinois auprès de l'ONU à Genève, Chen Xu, espère lui que les Etats-Unis, une fois membre du Conseil, puissent "mener un dialogue constructif et essayer de ne pas faire des droits humains un instrument politique".

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"Nous sommes nous-mêmes prêts à poursuivre cette approche consistant à promouvoir le dialogue, à s'opposer à la politisation, à essayer de mettre davantage l'accent sur les besoins des pays en développement", précise-t-il.

Pour l'élection de cette année, des ONG ont accusé les groupes régionaux d'avoir présenté le même nombre de candidats que de sièges vacants -- une "mascarade électorale" pour l'ONG UN Watch -- et de ne pas avoir mis un frein à la candidature de pays autoritaires.

La présence de ces Etats au Conseil est l'une des raisons qui avaient poussé l'administration de Donald Trump à quitter l'institution en juin 2018, en l'accusant d'hypocrisie et de s'acharner contre Israël.

Si le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a souligné cette année l'importance du Conseil notamment pour attirer rapidement l'attention sur des crises, il ne l'en a pas moins encouragé "à se pencher sur sa manière de fonctionner".