C’est par ce cri hostile au président Patrice Talon que les policiers ont été accueillis dans la rue de l’ancien chef de l’Etat Boni Yayi.
Un habitant, témoin raconte que "un parmi nous est parti voir les policiers et ils ont dit qu'ils ont appris qu'il y avait une marche par rapport aux résultats donnés mardi. Donc ils sont venus pour empêcher le président Boni Yayi de sortir".
Très rapidement, les voies menant au domicile de Boni Yayi ont été barricadées, la foule rassemblée chassée à coup de gaz lacrymogène. En riposte, les manifestants ont commencé à lancer des pierres.
Une personne est morte et un autre grièvement blessés depuis le début des violences qui ont éclaté mercredi après-midi après le déploiement des forces de sécurité autour du domicile de l'ancien président Boni Yayi dans la capitale économique.
Une femme a succombé à ses blessures jeudi matin après avoir reçu une balle dans le dos lors des manifestations, selon les informations de VOA Afrique. Selon la famille, un autre manifestant est dans un état critique.
Alain, un jeune étudiant, confie à VOA Afrique avoir été appelé à manifester : "On était à la maison quand les gens nous ont appelés pour nous dire que les policiers sont venus encercler le domicile du président Yayi. Nous avons débarqué. Sur le terrain, on a vu des policiers installés, ils étaient nombreux avec plus de sept véhicules".
Boni Yayi encerclé par la police
M. Yayi avait appelé à boycotter le scrutin de dimanche dont l'opposition avait été exclue. Son domicile a été encerclé quelques heures après l'annonce d'un taux d'abstention record.
Station d’essence et parc de vente de véhicules brûlés, le distributeur automatique de billets d’une banque saccagé, le bilan est bien lourd pour une manifestation qui n’a duré que quelques heures.
Certains usagers de la route, obligés de faire le grand tour avant de rentrer, s’énervent et condamnent ce regain de violence. "Ce n'est pas bon, nous voulons la paix dans notre pays", souligne un Béninois.
"Il s'agit des gens qui ont promis faire la violence. On dirait qu'ils o't mit leur menace à exécution. Sincèrement moi je suis découragé", explique un autre.
Arrestation manquée de l’ancien président ou opération destinée à empêcher une marche non autorisée? L’avocat de Boni Yayi répond par l'affirmative sur la tentative d'arrestation, pendant que le ministre de l’Intérieur apporte un démenti formel.
Pour lui, il s’agissait juste d’empêcher une marche non autorisée. Pour les jeunes patriotes du Bénin, les anciens présidents doivent préserver la paix.
"Les élections ont eu lieu, nous avons voté dans la paix. Le vote a eu lieu dans la paix et la quiétude. La fin du film est très claire".
L’ancien président a bénéficié du soutien de ses pairs de l’opposition qui ont réitéré leur engagement à arracher la réorganisation du scrutin.
Depuis mercredi à 17 heures, une ceinture de sécurité a été formée autour du palais de la présidence de la République, les portes de l’office de radiodiffusion et de télévision fermées et la sécurité renforcée.
Usine incendiée
Mais les violences ont aussi atteint le Nord. A Kandi, l'une des principales usines de coton du pays - secteur dans lequel le président Talon a fait fortune avant de se lancer en politique - a été incendiée dans la nuit.
"Des manifestants ont mis le feu à l'usine dans la soirée. On a encore aucune idée des dégâts mais ils sont énormes. Tout a brûlé", a confié à l'AFP un sapeur-pompier béninois.
Selon un habitant de Kandi joint au téléphone, les manifestants ont même tenté de "s'en prendre aux pompiers qui essaient d'éteindre le feu".
Ses détracteurs accusent le président Patrice Talon d'avoir engagé un tournant autoritaire au Bénin, pays modèle de la démocratie en Afrique de l'Ouest.
Chez ses opposants comme au sein de la société civile, on l'accuse d'être derrière l'exclusion des grands partis d'opposition - officiellement évincés pour n'avoir pas respecté le nouveau code électoral.
Le taux d’abstention de près de 80 %, selon des résultats partiels de la commission électorale, est considéré comme un désaveu pour le chef de l'Etat même s'il est assuré de voir les partis proches du pouvoir - seuls en lice - remporter la majorité au Parlement.
Mardi, les anciens présidents Boni Yayi (2006-2016) et Nicéphore Soglo (1991-1996) ont évoqué un "coup d'Etat électoral".
Amnesty International et de nombreuses associations locales de la société civile béninoise ont dénoncé les coupures d'internet ainsi qu'un "niveau de répression alarmant" au Bénin.
Avec AFP