Une foule compacte a défilé dans le centre de la capitale, plus importante que les vendredis précédents, quand la mobilisation semblait marquer le pas, selon un journaliste de l'AFP sur place.
Il est toujours impossible d'évaluer précisément le nombre des manifestants en l'absence de tout comptage officiel.
"Ou c'est vous ou c'est nous ! Nous n'allons pas nous arrêter !", scandaient les protestataires, encadrés par un important dispositif policier, à l'adresse de leurs dirigeants.
"Ce 50e vendredi est pour nous une occasion de donner un nouvel élan au mouvement", a déclaré à l'AFP Chacha Remini, une retraitée de l'Education, âgée de 58 ans.
"Notre objectif reste inchangé: le démantèlement du +système+ (au pouvoir) et la libération de tous les détenus" arrêtés dans le cadre de la répression du "Hirak" et dont les portraits sont brandis dans les défilés, a-t-elle souligné.
- Arrestations et condamnations -
Né le 22 février 2019 pour contester la candidature à un 5e mandat du président Abdelaziz Bouteflika, le "Hirak" a obtenu en avril la démission du chef de l'Etat, au pouvoir depuis 20 ans, et exige depuis le départ des acteurs du "système" en place depuis l'indépendance du pays en 1962.
Toutefois, beaucoup s'interrogent sur la direction que doit prendre aujourd'hui ce mouvement sans précédent, pluriel et pacifique mais sans structure officielle, depuis la récente élection d'un nouveau président, Abdelmadjid Tebboune, et la nomination de son gouvernement.
En réponse à la contestation, M. Tebboune, 74 ans, un ancien fidèle de M. Bouteflika, prône le dialogue en vue d'un "changement radical du mode de gouvernance" du pays.
Il a entamé des consultations avec des personnalités politiques en vue d'amender la Constitution, dont le texte serait soumis à référendum.
Mais malgré cette apparente ouverture, la répression se poursuit.
Depuis la présidentielle, les manifestants du "Hirak" continuent d'être arbitrairement arrêtés et poursuivis, a déploré cette semaine Human Rights Watch (HRW).
Deux détenus, Toufik Kerfa et Yacine Elouareth, arrêtés fin novembre, ont été condamnés vendredi à Alger à trois mois de prison ferme lors de leur procès en appel, accusés notamment d'"attroupement non armé, association de malfaiteurs et atteinte à la sécurité de l'Etat", a indiqué le Comité national de libération des détenus (CNLD).
A Tlemcen (nord-ouest), le procureur a requis un an de prison ferme contre 20 manifestants accusés d'"attroupement non armé" et d'"entrave au bon déroulement" de la dernière élection présidentielle, a précisé le CNLD.
Selon cette association, créée pour venir en aide à ceux arrêtés dans le cadre de la contestation, plus de 120 personnes sont toujours détenues en attente de procès ou condamnées pour avoir pris part au mouvement. Le CNLD a fait état de nouvelles interpellations lors des marches de vendredi à Alger et en province.
- Cause palestinienne -
Aux slogans habituels contre le régime, se sont ajoutés ce vendredi des emblèmes palestiniens, drapeaux et keffiehs une cause populaire en Algérie et des pancartes fustigeant le récent plan Trump pour le Proche-Orient.
"C'est une question liée à la libération d'un peuple. L'Algérie a de tout temps soutenu la cause palestinienne", expliquait Lakhdar Azizi, professeur de maths dans un lycée d'Alger, marchant à la tête d'un carré pro-palestinien.
"Les Palestiniens sont victimes d’une nouvelle injustice. Nous demandons au président Tebboune de prendre position publiquement contre le plan de Trump", a commenté Zoubir, un quinquagénaire entrepreneur du bâtiment, une écharpe palestinienne autour du cou.
La manifestation s'est dispersée sans incident en fin d'après-midi. Des marches similaires ont eu lieu dans le reste du pays, notamment à Oran, Sétif, Tlemcen et Mostaganem, ainsi qu'à Tizi Ouzou, en Kabylie, selon des médias locaux.