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Boko Haram a commis un crime contre l’humanité selon des images des satellites


Une foule s'assemble au lieu d'une explosion au marché central, à Maiduguri, Nigeria, le 1er juillet 2014.
Une foule s'assemble au lieu d'une explosion au marché central, à Maiduguri, Nigeria, le 1er juillet 2014.

Les islamistes de Boko Haram ont mené leur offensive la plus "destructrice" début janvier dans le nord-est du Nigeria, un "crime contre l'humanité" pour Washington, dont l'ampleur est documentée par de saisissantes photos satellites fournies par des ONG.

Ces images vues du ciel des villes de Baga et Doron Baga (nord-est), sur les rives du lac Tchad, prises avant et après l'attaque lancée le 3 janvier par Boko Haram - et d'autres également publiées jeudi par Human Rights Watch (HRW) - montrent l'étendue des destructions dans les deux villes.

"L'une d'entre elles (a) presque été rayée de la carte en l'espace de quatre jours", explique Amnesty International dans un communiqué. "Les meurtres délibérés de civils et la destruction de leurs biens par Boko Haram constituent des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité et appellent une enquête en conséquence", estime Amnesty.

Des centaines de personnes, "voire plus" selon l'ONG, pourraient avoir péri pendant l'attaque de Baga - un grand carrefour commercial régional situé dans l'extrême nord-est du pays -, de Doron Baga et des villages aux alentours, alors que le raid sur la zone a duré plusieurs jours.

L’insurrection de ce groupe dure déjà depuis six ans.

Ce massacre "est un crime contre l'humanité, et pas autre chose. C'est le massacre atroce d'innocents", a réagi le Secrétaire d'Etat américain John Kerry, de passage jeudi en Bulgarie.

"Boko Haram continue d'incarner une menace grave, non seulement pour le Nigeria et la région, mais pour l'ensemble de nos valeurs", a commenté le chef de la diplomatie américaine, décrivant le groupe comme "une des entités terroristes les plus malfaisantes et menaçantes actives aujourd'hui sur la planète".

L'armée nigériane, qui a tendance à minimiser les bilans de victimes, a affirmé cette semaine que 150 personnes avaient été tuées, qualifiant de "sensationnalistes" les estimations évoquant 2.000 morts.

HRW estime de son côté impossible de donner un bilan précis pour l'instant, citant un habitant en fuite qui dit que "personne n'est resté sur place pour compter les morts".

Les photos aériennes d'Amnesty, prises à Baga et à Doron Baga à cinq jours d'écart - la veille de l'attaque et quatre jours après - montrent de nombreuses habitations et commerces rasés.

Plus de 3.700 bâtiments ont été endommagés ou détruits: 620 à Baga et 3.100 à Doron Baga, selon un calcul d'Amnesty.

D'après HRW, la ville de Doron Baga, qui se trouve à 2,5 km à la sortie de Baga et abrite la base d'une force armée régionale, la Multinational Joint Task Force (MJTF), a été la plus durement touchée.

Au total, 16 localités ont été brûlées et 20.000 personnes ont dû fuir la région, ont indiqué des responsables locaux.

A lui seul, le Tchad voisin a accueilli 11.320 réfugiés nigérians en quelques jours, selon le Haut-commissariat aux réfugiés des Nations Unies, tandis que Médecins sans frontières (MSF) a déclaré aider quelque 5.000 survivants de l'attaque réfugiés à Maiduguri, la capitale de l'Etat de Borno, à quelque 200 kilomètres.

Pour Amnesty, cette attaque est "la plus grande et la plus destructrice" jamais perpétrée par le groupe armé depuis le début de son insurrection en 2009, qui depuis a fait plus de 13.000 morts et 1,5 million de déplacés.

Au fil des récits des survivants, de nouveaux détails émergent sur les atrocités des islamistes.

Un témoin cité par Amnesty, sous couvert d'anonymat, décrit une femme enceinte abattue en plein accouchement, en même temps que plusieurs jeunes enfants.

"La moitié du bébé (était) sortie et elle est morte dans cette position", raconte le témoin.

"Ils ont tué tellement de gens. J'ai peut-être vu 100 personnes tuées à un moment à Baga. J'ai couru dans la brousse. Alors que nous courions, ils mitraillaient et tuaient", décrit un quinquagénaire non identifié.

Une autre femme confirme: "Il y avait des cadavres partout où je regardais".

Ces témoignages corroborent les propos de responsables locaux, selon qui le nombre de victimes est extrêmement élevé, ainsi que de témoins contactés par l'AFP qui décrivaient des rues parsemées de cadavres en décomposition.

Un homme échappé de Baga après être resté caché trois jours avait ainsi déclaré avoir "marché sur des cadavres" sur cinq kilomètres, dans sa fuite à travers la brousse.

Des témoins ont aussi rapporté à Amnesty que 300 femmes avaient été enlevées. Détenues dans une école, les plus âgées, les mères et les enfants ont ensuite été libérées, mais les jeunes femmes seraient toujours captives.

L'attaque de Baga est survenue à un peu plus d'un mois des élections présidentielles et législatives prévues le 14 février, et cette flambée de violence pourrait perturber la tenue du scrutin.

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