A travers l'Afrique de l'Ouest, l'exploitation des extraits du karité, un arbre dont les amandes produisent du beurre, est la principale source de revenus pour nombre de familles. Dans le Nord du Togo, les femmes sont les gardiennes de ce savoir-faire séculaire. Du décorticage des amandes à la confection de la pâte, jusqu’à l’extraction du beurre, tout est fait à la main. Un travail pénible qui demande patience et abnégation mais qui rapporte relativement peu aux ouvrières.
Ekoima Pierrette Tokè-N’sa connait bien cette réalité pour avoir grandi dans la tradition du karité. Sa mère a été l’une des premières femmes à vendre le beurre de karité du Nord vers le Sud du Togo. Pour perpétuer cet héritage, la jeune entrepreneure a décidé de reprendre l’affaire familiale … en y apportant une touche de modernité.
Avec sa marque de cosmétiques Tokè-N’sa, elle produit du beurre de karité, travaillé sous différentes formes et proposé en plusieurs senteurs. Sa démarche vise à valoriser le karité autrement, explique-t-elle : "Tokè-N’sa la marque est née pace que j’avais remarqué qu’il y avait beaucoup de préjugés sur son utilisation et surtout une culture de dévalorisation d’un produit qui est hautement exploité ailleurs. J’ai tout simplement décidé de présenter ce que le beurre de karité représente pour moi et pour des millions de productrices à travers l’Afrique".
Un projet familial
Ce projet se fait de concert avec les femmes productrices de karité de sa famille. Il vise à soutenir leurs efforts en leur assurant une sécurité financière.
Adjovi, une habitante de Lomé, consomme beaucoup le beurre de karité, et c’est tout naturellement qu’elle est tombée sous le charme des produits Toke-N’sa. "La marque fait du commerce équitable. Ce qui n’est pas forcément le cas de la plupart des marques sur le marché. Au-delà de ce qu’elle vend, il y a toute une histoire d’amour qui vous emporte. L’histoire de la fabrication du beurre de karité, l’histoire de ces femmes qui travaillent le karité", se réjouit-elle.
Le beurre de karité se retrouve sous forme de boule dans les marchés du Togo. Son prix varie de 25 francs à 100 francs CFA selon la taille, ce qui est peu rentable. Avec son projet, Pierrette présente autrement son beurre de karité mais en plus, elle y a ajouté une technique d'emballage plus attrayante associée à une bonne communication afin d’accroitre son chiffre d’affaires.
"Il était important pour moi, à travers nos packagings, de valoriser ce que l’on a ici sans toutefois compromettre notre identité et nos richesses", estime Pierrette Ekoima Tokè-N’sa. Pour elle, "un meilleur beurre de karité c’est une fidélisation de la clientèle et qui dit clients fidèles et satisfaits, dit bouche à oreilles, ce qui entraine automatiquement une augmentation du chiffre d’affaires".
Une bonne stratégie commerciale
La visibilité des marques locales est un élément essentiel dans la démarche commerciale d’un entrepreneur. Et pour renforcer leur positionnement sur le marché national et international, une bonne stratégie est indispensable. Les Etats ont un rôle à y jouer, selon le consultant en développement commercial Osspiss KOM.
"Aujourd’hui, il est très important que l’Etat puisse s’impliquer davantage en initiant un comité stratégique de réflexion sur la question du développement des marques locales et leur positionnement sur l’échiquier national et international. Ce comité aura en charge de pouvoir organiser des stratégies de vente, de branding pour positionner les marques. Nous croyons fermement que le problème des Africains, c’est la stratégie", a-t-il indiqué.
Avec une telle stratégie, la marque de Pierrette Ekoima Tokè-N’sa est aujourd’hui l’une des plus prisées au Togo.